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Critique de Marie-Nel


J'aime beaucoup les romans des éditions De Borée, des histoires qui parlent de gens comme vous et moi, pris parfois dans les tourments de l'Histoire avec un grand H. Ils me permettent aussi de découvrir des régions de France, c'est à chaque fois un beau voyage. Ici, j'ai été transportée en Occitanie, une région que je ne connais pas du tout, les noms des villes et villages ont une résonnance pleine de soleil. 

C'est à Ferrières, près de Millau, que commence le livre. J'y ai fait la connaissance de Manon. Elle a 15 ans, vit avec son frère et sa soeur chez ses parents, très pauvres. le père est alcoolique et la mère est maltraitée par celui-ci, comme il maltraite également ses enfants. Manon est une jolie jeune fille. Un jour où Julien Fabre, fils d'agriculteurs, revient de son travail à Millau, il croise Victor Racannière en train d'agresser Manon. Julien le chasse et rapporte l'incident au village. le maire décide d'intervenir et propose au père de Manon le placement de celle-ci chez les Fabre. le maire fait surtout cela pour sauver Manon de là où elle se trouve, il sait qu'elle est en danger entre son père et Victor, surtout que ces deux-là s'entendent bien et manigancent ensemble. En la plaçant chez les Fabre, il sait que Manon sera épargnée, et ses parents toucheront un dédommagement. Lorsqu'elle arrive chez les Fabre, la mère, Louise, prend tout de suite sous son aile la jeune fille, maigre, mal nourrie. Manon fait de menus travaux, elle se sent bien chez eux, à l'abri, et commence à ressentir des sentiments pour le fils, Julien. Mais celui-ci ne sera pas longtemps présent à la ferme car il va être appelé pour son service militaire et partir en Algérie où la guerre fait rage, nous sommes en 1959. Il ne préfère pas s'engager auprès de la jeune fille, redoutant son avenir incertain. Mais il y en a un qui n'a pas oublié Manon, c'est Victor, il arrive à remonter le père de Manon, et décide de se venger de l'affront de Manon. Et ce qu'il lui a concocté va la replonger dans la misère, comment va-t-elle s'en sortir, va-t-elle enfin être tranquille. Je n'en dirais-tu pas plus, et vous laisserai le découvrir.

Je me suis attachée tout de suite à Manon, j'ai tout de suite eu envie de la protéger, à l'aider de se sortir de sa situation. En plus, à sa naissance, la sage-femme a déclaré qu'une malédiction suivrait l'enfant toute sa vie, et Manon finit par le croire. Derrière son apparence fragile se cache une jeune fille très forte, très courageuse surtout pour supporter ce qu'elle vit chez ses parents. Elle est volontaire et ne rechigne pas à la tâche. Même lorsqu'elle vivra chez les Fabre, elle n'oubliera pas son frère et sa soeur qu'elle gâtera dès qu'elle le pourra. Elle n'est pas méchante du tout, et même si son père est violent avec elle, elle ne lui en veut pas. Elle se transforme quand elle est chez les Fabre, où elle est mieux considérée, elle prend alors de l'assurance, elle se rend compte qu'elle a du répondant et qu'elle peut changer sa vie en mieux. Ses sentiments avec Julien sont beaux, innocents, comme deux jeunes gens qui découvrent l'amour. La vie va être difficile avec elle. Lorsqu'elle se croira enfin tranquille, c'est Julien qui part en Algérie, et d'autres soucis viennent l'empêcher d'être heureuse. L'inquiétude de savoir Julien loin, être dans l'attente de ses lettres, avoir peur de voir le maire arriver, annonciateur de mauvaises nouvelles chez d'autres du village. Elle gardera toujours au fond d'elle une lueur d'espoir qui la fera tenir. 

Les autres personnages qui gravitent autour de Manon sont eux aussi très intéressants et très attachants, enfin surtout du côté des Fabre. J'ai beaucoup aimé cette famille, travailleuse, humaine et très empathique envers les autres. René Barral a très bien travaillé chacun d'eux, rendant attachants ceux qui sont gentils, et détestables les autres, comme Victor par exemple. Au début, le père de Manon est dans la même case que Victor. J'ai bien aimé la façon dont l'auteur le fait évoluer. C'est un homme qui saura écouter tout de même les autres et se rendre compte de la mauvaise influence de Victor sur lui. Je ne peux en dire plus, mais j'ai découvert une autre facette du personnage et j'ai bien aimé. Julien est lui aussi très attachant, très courageux aussi et comme ses parents, très humain et empathique. Même lorsqu'il se retrouvera au front avec ses copains. J'ai tremblé et eu peur pour lui, j'avais très envie qu'il s'en sorte, le danger n'est jamais loin. 

René Barral nous conte ici une très belle histoire, c'est un roman du terroir comme je les aime qui m'a transportée dans la ruralité des années 60, au moment où les technologies arrivent dans les fermes, où les paysans se prêtent les machines pour les moissons. J'ai beaucoup aimé l'ambiance qui règne, le temps des moissons et l'insouciance, les grandes tablées de paysans qui s'entraident, une façon de vivre qui n'existe plus de nos jours, et c'est parfois bien regrettable. La vie était dure, mais les gens savaient être solidaires. L'auteur dépeint très bien tout cela. Il décrit très bien la mentalité des gens, la vie d'un village avec ses histoires, et bien sûr les lieux. J'ai réussi à les visualiser, et à m'évader le temps de la lecture. 

Le livre est construit avec deux parties. La première est plus longue que la seconde. Elle pose les personnages, les lieux, elle raconte surtout l'histoire de Manon et Julien. La seconde partie est plus axée sur Julien lorsqu'il se retrouve en Algérie, pendant la guerre. J'ai beaucoup aimé cette façon d'avoir bâti son histoire. La lecture est attrayante, addictive, j'ai été emmenée dès les premières pages et ne me suis pas rendue compte d'avoir lu les cent premières pages. Il faut dire aussi que l'auteur arrive très vite à capter l'attention du lecteur, le style est très fluide, je me suis sentie tout de suite investie dans l'histoire et je n'avais pas envie de quitter les personnages sans savoir ce qui allait arriver. Je découvre René Barral avec ce livre et je suis conquise par son style. Pourtant c'est son treizième roman, j'ai du coup ajouté des livres dans ma wishlist. Je serais ravie de le retrouver dans une autre histoire dans cette Occitanie qu'il aime. 

L'auteur livre de très beaux messages sur la vie rurale et sur ses habitants, sur l'amitié, l'empathie, la jalousie, la vengeance. Il parle aussi très bien de la guerre d'Algérie, des enjeux politiques, du déroulement des hostilités. J'imagine qu'il a dû faire un gros travail de recherche en amont de l'écriture. Je n'ai pas lu beaucoup de livres avec cet événement en toile de fond, j'en ai appris beaucoup grâce à ce livre et son auteur. J'aime beaucoup quand mes lectures ont ce double pouvoir de me divertir et m'instruire en même temps. C'est une histoire remplie d'espoir et d'une belle luminosité. J'ai été très touchée et émue par certains passages. 

Je pense que vous l'aurez compris, j'ai passé un excellent moment avec ce livre que je vous recommande vivement. Si vous aimez les histoires authentiques, parlant de nos belles régions de France, n'hésitez pas à découvrir les romans des éditions De Borée et particulièrement celui-ci de René Barral
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