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Critique de Cigale17


J'ai pensé que La Treizième Heure pouvait être une sorte de clin d'oeil à La Vingt-Cinquième Heure, mais non, rien à voir, je crois. Trois narrateurs prendront successivement la parole : Farah (la fille), Lenny (le père), Hind (la mère), et de nouveau Farah pour une très brève quatrième partie. Mais rien n'est aussi simple qu'il n'y paraît. Farah, remarquablement lettrée et emplie de maturité pour son âge, commence à raconter son parcours d'adolescente intersexuée. Sa mère a disparu quelques jours après sa naissance. Son père a fondé une sorte de secte – il refuse de toutes ses forces cette appellation – disons donc une congrégation, dont il est le charismatique gourou. Farah juge et son père et ses adeptes avec beaucoup de lucidité, mais aussi de partialité, ce qui n'est pas incompatible : indulgente pour certains, elle dénigre certains autres. Elle brûle de curiosité envers cette mère qu'elle n'a pas connue et dont son père évite de parler autant que possible. Quand elle interroge ses grands-parents paternels, ils se défaussent ou disent n'importe quoi. En fait, ils disent toujours n'importe quoi. Quand Lenny prendra la parole à son tour, le lecteur comprendra certaines de ses réticences : il est des situations bien complexes à expliquer à une adolescente et les apparences sont souvent trompeuses… L'intervention de Hind bousculera ce que l'on croyait savoir. Je ne vois pas comment en dire plus sans révéler trop d'éléments dévoilés progressivement et parcimonieusement dans le roman.
***
Un roman surprenant, parfois dérangeant et furieusement dans l'air du temps… C'est peut-être ce qui m'empêche d'être plus enthousiaste : une sorte de surenchère dans la volonté de traiter les questions de genre et d'identité. L'autrice aborde aussi plusieurs autres thèmes contemporains, mais sans s'y attarder. La plongée dans les interrogations et les souffrances des trois personnages mène forcément à leur propre vision de l'identité, intimement liée à leur histoire personnelle, et dénote une profonde empathie de la part d'Emmanuelle Bayamack-Tan, empathie qu'elle a parfaitement réussi à me faire éprouver. le personnage de Hind est sans doute le plus étonnant, mais aussi le plus fouillé, celui qui réserve le plus de surprises parce qu'il ne correspond pas à l'image qu'il projette, ni à ce que les autres, même les proches, en perçoivent. le personnage de Lenny ne m'a pas convaincue, encore moins celui de Kenny, son frère (merci aux parents !) dont le rôle perturbateur est à peine effleuré. Il m'a semblé que la lucidité et le courage de Farah détonnaient avec son âge et la crise d'adolescence qu'elle traversait. Bref, en dépit de mes réserves, je trouve que c'est un bon roman, plein d'humour, de poésie et de chansons, un récit qui traite crûment et sans pudeur de questions délicates dans une optique résolument contemporaine.
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