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Critique de ELopez7228


J'ai pensé mettre deux étoiles au départ.
D'abord, parce que ce roman a été écrit en 1949, si j'en crois la première édition, et que sous certains aspects, il a mal vieilli. Simone de Beauvoir envisage les femmes (je déteste "la femme" ; comme si 4 milliards d'individus étaient monolytiques...) sous un aspect exclusivement hétérosexuel, et, quitte à enquiquiner Jean-Michel Réac, sous un aspect exclusivement CIS.
Elle ne s'interroge pas sur le genre. Sa "femme" est sexuée, cis et hétéro.
Ensuite, parce que le texte est touffu, parfois abscons, avec des analyses médicales ou psychologiques si complexes et détaillées que j'ai parfois tout à fait perdu le fil et surtout, que je me demandais où elle voulait en venir.

Par la suite, j'ai envisagé de mettre 4 étoiles, car elle met le doigt sur des éléments sociétaux de construction/manifestation du patriarcat qui sont percutants et absolument modernes et contemporains. Pour certains, qui trouvent une résonnance dans l'actualité d'aujourd'hui.

Plutôt que d'expliquer, voici quelques extraits choisis :

"On ne saurait obliger directement la femme à enfanter : tout ce qu'on peut faire c'est l'enfermer dans des situations où la maternité est pour elle la seule issue : la loi ou les moeurs lui imposent le mariage, on interdit les mesures anticonceptionnelles et l'avortement, on défend le divorce."

"Il se fait ici le porte-parole de la bourgeoisie dont l'antiféminisme redouble de vigueur par réaction contre la licence du XVIIIè et contre les idées progressistes qui la menacent"
> Je vois là une réaction bien connue des groupes réactionnaires d'aujourd'hui, des CNews, des médias masculins : plus les femmes menacent l'ordre patriarcal établi, plus ces hommes se sentent menacés et deviennent virulents en réaction. D'où les discours sexistes en roue libre dans les médias, par exemple.

"Les femmes sont asservies à la cuisine, au ménage, on surveille jalousement leurs moeurs ; on les enferme dans les rites d'un savoir-vivre qui entrave toute tentative d'indépendance. Par compensation, on les honore, on les entoure des plus exquises politesses."
> la galanterie, payer le dîner, tenir la porte... c'est une "compensation" pour la soumission qu'on impose aux femmes par ailleurs. Regardez ces Etats où les femmes n'ont pas le droit de conduire ni de travailler... leurs oppresseurs se défendront en disant qu'elles sont "des princesses". La réalité, c'est qu'elles sont enfermées dans une dépendance absolue. L'alternative, c'est la misère ou la mort. Tu parles d'un privilège !

"La femme bourgeoise tient à ses chaînes parce qu'elle tient à ses privilèges de classe".
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"Cette faiblesse du féminisme a sa source dans ses divisions intestines ; à vrai dire, comme on l'a déjà signalé, les femmes ne sont pas solidaires en tant que sexe : elles sont d'abord liées à leur classe ; les intérêts des bourgeoises et ceux des femmes prolétaires ne se recoupent pas."
> et ça, c'est la raison pour laquelle je n'adhère pas au féminisme d'une Badinter, d'une Schiappa, d'une Deneuve. Ces femmes protègent avant tout leur classe et les privilèges y afférent, et sont à des années lumières d'être "universelles", malgré leurs affirmations.

"En 1912, elles adoptent une tactique plus violente : elles brûlent des maisons inhabitées, lacèrent des tableaux, piétinent des plates-bandes, elles lancent des pierres contre la police."
> "nia nia nia les féministes autrefois étaient polies et mesurées". Meilleure blague.

"De même qu'en Amérique il n'y a pas de problème noir mais un problème blanc ; de même que "l'antisémitisme n'est pas un problème juif : c'est notre problème" ; ainsi le problème de la femme a toujours été un problème d'hommes."
> Amen, et je vous laisse là-dessus.

Donc un bouquin avec des éclairs de génie et de modernité ET des passages longs, assommants, indigestes. 3 étoiles pour la moyenne.
Pas un livre à conseiller aux lectrices débutantes, ni même aux féministes débutantes. Les ouvrages de Mona Collet, Virginie Despentes, Chimamanda Ngozi Adichie, sont plus accessibles.
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