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Critique de colimasson


Avec L'amour dure trois ans, Beigbeder nous fait encore la démonstration de son talent d'ex-publicitaire. L'amour dure trois ans, vraiment ? Et après ça, qu'est-ce qu'on trouve ? Beigbeder répond à son lecteur sur le même ton mordant mais toutefois désenchanté qui avait fait sa marque de fabrique dans 99F.

« Un moustique dure une journée, une rose trois jours. Un chat dure treize ans, l'amour trois. C'est comme ça. Il y a d'abord une année de passion, puis une année de tendresse et enfin une année d'ennui. »

C'est irrémédiable, on ne peut rien y faire, et après un nouveau divorce avec la femme qu'il s'était promis d'aimer, Marc Marronnier (derrière qui se cache Beigbeder) décide de faire du titre de son livre son nouvel adage. Plus de déceptions maintenant, c'est promis : en sachant dès le début que toute nouvelle passion sera périmée au bout de trois ans, il espère ne plus jamais s'effondrer à chaque nouvelle séparation. Et c'est avec cette idée en tête que Marc se lance dans une nouvelle histoire, déployant toute l'ambivalence de ses sentiments : celle-ci, il en est sûr, c'est la femme de sa vie, mais ça ne durera pas plus de trois ans…

« Après trois ans, un couple doit se quitter, se suicider, ou faire des enfants, ce qui sont trois façons d'entériner sa fin. »

La première partie du livre est mordante à souhait. Beigbeder démonte toutes les hypocrisies de la vie matrimoniale et fait ressurgir, avec une honnêteté dans laquelle chacun pourra se retrouver à un moment ou à un autre, tous les travers de la vie en couple.

« Je me suis mis à repousser la main d'Anne sans arrêt. Elle me prenait gentiment la main, ou le bras, ou bien posait sa main sur ma cuisse quand nous regardions la télé, et moi que voyais-je ? Une main molle, blanchâtre, avec la consistance d'un gant Mappa. Je frissonnais de dégoût. C'était comme si elle posait un poulpe sur moi. »

Au fil des pages et de ses rencontres, Beigbeder étaye quelque peu sa vision des choses. Il prend du recul et commence à accepter l'idée d'une vie commune qui ne peut pas être passionnée et enivrante tous les jours. A travers la dénonciation d'une société qui prône l'apparence du bonheur avant le bonheur lui-même, la jouissance de tous les instants et l'impossibilité du malheur, Beigbeder détruit l'idéal de l'amour tel qu'on le lui a imposé pour mieux réfléchir à ce qu'il attend vraiment de la vie en couple.

« Plus on cherche à être passionné et plus on est déçu quand ça s'arrête. Ce qu'il faut, c'est chercher l'ennui, comme ça tu seras toujours surpris de ne pas te faire chier. La passion ne peut pas être « institutionnelle », c'est l'ennui qui doit être la normale –et la passion une cerise sur le gâteau. »

« Autrefois, les mariages résistaient à ce genre de passades. Aujourd'hui les mariages sont des passades. La société dans laquelle nous sommes nés repose sur l'égoïsme. Les sociologues nomment cela l'individualisme alors qu'il y a un mot plus simple : nous vivons dans la société de la solitude. Il n'y a plus de familles, plus de villages, plus de Dieu. Nos aînés nous ont délivrés de toutes ces oppressions et à la place ils ont allumé la télévision. Nous sommes abandonnés à nous-mêmes, incapables de nous intéresser à quoi que ce soit d'autre que notre nombril. »

Les réflexions sont parfois un peu faciles et semblent couler de source, mais même si Beigbeder n'invente rien, cela fait toujours du bien de relire des vérités premières.
Malheureusement, la dernière partie du livre s'embourbe dans un ton mielleux plutôt étonnant pour l'écrivain. Tout à fait surprenant (dans le mauvais sens) Beigbeder se met à nous conter son histoire de prince et de princesse charmants évoluant au milieu des prés en fleurs, riant et s'ébattant dans la paille avant de regarder un coucher du soleil en sirotant un cocktail… Ceci sans ironie aucune, cette idylle d'êtres humains à la Adam et Eve –sans aucunes contraintes d'ordre familial, professionnel, social ou quelconque…- seulement menacée par le spectre des trois ans…
Alors bon, oui, d'accord, ça peut faire du bien de lire un Beigbeder qui, pour une fois, ne tape pas sur tout comme un gamin énervé, mais quand même, cette histoire est un peu trop con pour qu'on y croie. Et comme je préfère Beigbeder en méchant publicitaire plutôt qu'en gentil conteur de fées, je préfère n'en retenir que les passages les plus truculents… :

« Voilà un test très simple pour savoir si vous êtes amoureux : si au bout de quatre ou cinq heures sans votre maîtresse, celle-ci se met à vous manquer, c'est que vous n'êtes pas amoureux –si vous l'étiez, dix minutes de séparation auraient suffi à rendre votre vie rigoureusement insupportable. »

« […] faire l'amour est tellement plus agréable quand on est amoureux. Cela donne aux femmes l'impression que les préliminaires durent plus longtemps, et aux hommes l'impression qu'ils passent plus vite. »

"Il n'y a pas de femme moche, il n'y a que des verres de vodka trop petits."

« A part une casserole de lait qui déborde, il n'y a pas grand-chose sur terre de plus sinistre que moi. »

A bon entendeur !
Lien : http://colimasson.over-blog...
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