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Critique de Plumeetencre



"Je ne sais pas si ma mère a été une bonne mère. Ou simplement une mère qui a fait ce qu'elle a pu. Avec ce que Dieu lui a donné comme connaissance, comme amour, comme courage. Comme patience aussi. Je sais juste que c'est la mienne. Et ma plus grande richesse en cette vie est d'avoir pu l'aimer."

***

Le narrateur, professeur de lettres âgé de cinquante quatre ans, partage ses journées entre cours à l'université et présence dévouée  auprès d'une mère mourante. 

Renonçant à tout projet de couple, il est revenu vivre dans le petit deux pièces schaerbeekois qui l'a vu grandir. 

Cadet d'une fratrie de cinq enfants, il est le seul à pouvoir veiller sur elle et l'accompagner dans cette fin de vie. 

À son chevet, "La peau de chagrin" d'Honoré de  Balzac entre les mains, il la regarde dormir. Quand elle se réveillera, le fils reprendra sa lecture comme à l'accoutumée. Ce précieux rituel constitue leur unique et dernier espace de partage.

En attendant,  il revisite le passé familial et se livre à quelques confidences sur cette femme illettrée d'origine marocaine qui est arrivée en Belgique dans les années cinquante accompagnée de son mari. 

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A la fois tendre, pudique, non dénué d'humour et terriblement émouvant, ce roman  nous plonge au coeur d'une relation filiale dont le temps est désormais compté.

Construisant son récit autour de souvenirs de jeunesse, Rachid Benzine esquisse par touches délicates le portrait d'une femme admirable ayant toujours eu pour principale ligne de conduite le don de soi. 

Suite au décès accidentel de son époux, elle a dû en effet assumer seule la fonction parentale et a relevé valeureusement tous les défis du quotidien pour offrir à ses fils une vie décente dans un pays autrefois hostile aux étrangers. 

Au travers de ses personnages, l'auteur met en lumière les difficultés inhérentes à la condition d'illettré, d'expatrié, de transfuge de classe mais aussi d'aidant familial. Il raconte la honte sociale,  les humiliations, la culpabilité ainsi que le fossé générationnel parfois abyssal qui se creuse au sein des  familles d'immigrés. Il nous rappelle également à la finitude de l'existence, aux adieux  déchirants auxquels chacun a dû et/ou devra faire face. 

Si le récit n'est pas autobiographique, il apparaît toutefois teinté de l'expérience personnelle de Rachid Benzine qui nous donne à découvrir ici un témoignage d'amour et de reconnaissance des plus touchants. 

Au fil des pages, on sourit, on fredonne les chansons intemporelles de Charles Aznavour et de Sacha Distel, on s'émeut, on s'indigne, on cache nos larmes. Puis on referme l'ouvrage heureux d'avoir partagé ces moments d'intimité et porté par l'envie de serrer fort contre soi ses propres parents. 

***

"Peut-on survivre à celle qui vous a donné la vie, qui vous a offert SA vie, veillant jusqu'au vieil âge sur votre bien-être,  votre bonheur,  soucieuse de votre santé et de vos ennuis? Sur quels genoux poserai-je ma tête embrumée? Quelles mains tiendrai-je pour me réconforter ? Quels yeux pourront irradier l'amour que seule une mère sait donner?" 

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