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Critique de TerrainsVagues


Deux remords de Claude Monet, c'est comme un cadeau.
Au premier abord, c'est le genre de livre que je n'ai aucune chance de croiser. Les biographies, romancées ou pas, ne sont pas ma tasse de thé. Ajoutez à cela une certaine indifférence ou plutôt une méconnaissance de la peinture et vous vous demanderez comment ce bouquin s'est retrouvé entre mes mains. Ca fait partie de la « magie » de Babelio. Un billet de Piatka, un autre de Lolokili qui ajoute à ma curiosité, d'autres billets appréciés, quelques échanges plus loin et me voilà convaincu d'accepter la très sympathique offre de prêt de Piatka (Merci vous :-) ).

Deux remords et trois chapitres plus loin, je tourne la dernière page en ayant l'impression que je viens de perdre un ami (oui il meurt à la fin, ce sont des choses qui arrivent parait-il) alors qu'il y a encore trois jours je ne connaissais de lui à peine deux ou trois tableaux et… et rien d'autre.
Ce n'est pas que j'en connaisse beaucoup plus aujourd'hui mais l'écriture de Michel Bernard m'a plongé dans le cercle des intimes du peintre au point de me le rendre presque familier. Une écriture toute en couleurs, toute en nuances. Chaque page a sa lumière, chaque page apprivoise ses ombres. Michel Bernard pose ses mots en touches subtiles.
J'ai entendu se déposer délicatement les flocons de neige les uns après les autres sur le sol gelé d'un hiver à Argenteuil et entendu crisser le pas de Monet sur ce tapi immaculé. J'ai voyagé avec lui par tous les temps pour parcourir les saisons du plaisir, chevalet sur le dos, et témoigner de l'instant. Figer pour l'éternité l'éphémère dissipé par la seconde qui suit, par toutes celles qui suivent et qui font la vie.
J'ai partagé un déjeuner sur l'herbe qui respirait l'amour et l'amitié. Je me suis perdu dans le drapé d'une robe verte. J'ai poursuivi Camille au jardin, je l'ai espérée avec sa capeline rouge et l'ai veillé sur son lit de mort.
J'ai été ému par les dégradés de gris des jours de pluie du peintre, émerveillé par les couleurs chaudes de ses amitiés, charmé par les variations de lumière donnant aux couleurs primaires de son existence une déclinaison de teintes infinie.

Pourquoi deux remords et pas trois?
L'amitié et l'amour, semblent indissociables pour Claude Monet.
Amitié pour Frédéric Bazille en premier lieu. Peintre mort pour la France, comme on dit, en 1870.
Amour pour Camille, première femme du peintre, partie trop jeune et seule femme qu'il ait réellement aimée d'après ce que j'ai cru comprendre.
Deux êtres disparus qui resteront liés et poursuivront Monet jusqu'à la fin de ses jours.
En effet Monet fera don à l'état des Nymphéas à condition que celui-ci achète « Femmes au jardin », représentant Camille, et qu'il soit exposé au Louvre. Son ami Clémenceau acceptera avec joie.
Si ce tableau est si important pour Monet c'est qu'il a appartenu à la famille Bazille et que c'est sous cette toile que Frédéric Bazille a été veillé les derniers jours avant son enterrement.
Camille, Frédéric, deux regrets parce que partis trop tôt. Deux remords parce qu'incapable de dissuader l'un de partir à la guerre, et culpabilisant peut être de n'avoir pas été assez présent quand le crabe a commencé à ronger la femme de sa vie. Deux remords peut être aussi pour jouer avec les maux, comme si à chaque souvenir qui s'estompait, Camille et Frédéric étaient « re morts ».

Dès l'apparition de Clémenceau dans la dernière partie du livre, je n'ai pas pu m'empêcher d'être en même temps un peu dans « le camp des autres » de Thomas Vinau. de me dire que pendant ce temps là où malgré des années difficiles, la vie était belle pour Monet, Gaspard rejoignait un camp des autres où tout était… différent…

Oui, « Deux remords de Claude Monet » a été un cadeau pour moi. le genre de cadeau qui « enrichi », qui ouvre vers un univers inconnu et passionnant. L'écriture de Michel Bernard est tout simplement…
Pour faire court, c'est l'écriture qui me touche, qui me parle. Remplie de poésie sans excès et sans figures de style. Une écriture qui m'a, l'espace d'une lecture, mis dans le tableau.

Biographie (romancée), peinture, énarque, c'était pas gagné au départ. Par contre à l'arrivée c'est jeu set match et dix de der Michel Bernard.
Vous aviez raison les filles, merci à vous pis à m'sieur Bernard aussi quand même.

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