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Critique de LaBiblidOnee


Effroyable et sublime. C'est ainsi que je qualifierais le recoupement de toutes ces voix que j'ai entendues car, même en seulement 160 pages de témoignages, lorsque le ton est vrai, si juste autant dans les jugements médisants que dans la bienveillance pure, la méfiance ou encore le bon sens, il y a de quoi être bouleversé par toutes ces émotions. J'ai écouté des personnages assez différents pour me faire passer par tous les états, comprendre tous les points de vue de cette histoire, pourtant intime et secrète, de montagnards taiseux ; un drame à faire pleurer dans les chaumières, alors que la pureté d'un éclat de rire aurait pu faire triompher la différence avec bienveillance.

Oui, j'étais là pour être interrogée, moi aussi. Je viens de la ville mais mon mari et moi avons acheté une maison ici pour nous ressourcer. J'attendais donc dans les couloirs de cette gendarmerie et je n'entendais pas les questions posées par vos collègues, mais je les reconstituais mentalement en écoutant les réponses clamées haut et fort par les auditionnés. J'étais hypnotisée par ce que j'entendais, chaque témoignage est tellement instructif sur tout ce que peut être la nature humaine ; j'aurais pu continuer longtemps encore à combler tout ce que j'ignorais de cette histoire en écoutant les villageois témoigner. Sauf que maintenant ce n'est plus possible ! A cause de nous, les Hommes (et ça me coûte de mettre cette majuscule à notre espèce), et des dérapages que notre intolérance chronique continue de perpétrer !!
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Non, bien sûr que non je ne savais pas que ça allait finir comme ça. Même si, en y réfléchissant, ça aurait pu finir en chasse à l'homme bien plus sauvage s'ils avaient dû le poursuivre dans la montagne ; mais le fait que je puisse ne serait-ce qu'imaginer cette scène, là avec vous, prouve que la faute n'est pas uniquement celle de ce gendarme qui a grave merdé, mais bien plutôt celle de notre société toute entière, dont les citoyens n'aspirent qu'à s'entourer d'êtres dits « normaux » tout en passant leur vie à faire des singeries pas possibles pour s'en démarquer ! Alors je vous le demande à vous, Inspecteur des inspecteurs, elle est où la normalité dans notre société, hein ? Où ?
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Bien sûr que je m'énerve, est-ce que vous vous rendez-compte de ce qui s'est réellement passé là, sous nos yeux ?! Jamais un truc pareil n'aurait dû se produire. Jamais on aurait dû traiter comme ça un homme qui était juste différent de la plupart des siens. Vous êtes un homme, alors ce que je vais dire est peut-être dur à avaler pour vous, mais « différent » c'était plutôt le meilleur compliment qu'on pouvait lui faire, si vous voulez mon avis - mon avis de femme, et mon avis de citoyenne. J'étais là, dans les couloirs, et j'ai tout vu, tout vu, vous m'entendez ? Et tout entendu ! Et je peux vous dire que les gendarmes, ils n'ont pas voulu entendre grand chose, jusque-là, c'est certain. C'est pourtant pas faute d'avoir successivement « entendu », selon leur propre jargon, l'institutrice du gosse soi-disant terrible - même si celle-là était trop formatée par son institution pour comprendre quoi que ce soit si vous voulez de nouveau mon avis, puisqu'elle les laissait le traiter d'ours et ne le voyait que comme une bête ; mais qui était la plus bête, je vous le demande, là, maintenant, avec tout ce que vous avez « entendu » et un peu de recul, hein ? - puis ils ont « entendu » des villageois - dont, certes, émanaient non-seulement des ragots, de la crainte, des médisances, mais parfois beaucoup de bon sens, ainsi que des légendes montagnardes mettant en scène des fées enlevant des enfants pour les élever dans une grotte, ce qui je vous l'accorde n'aidait pas à rationaliser l'affaire, mais enfin tout de même ! Ont également témoigné des voisins qui connaissaient bien cette famille, des amis même - vous entendez, des amis, alors que tous les prenaient naïvement pour des asociaux ! -, et puis le citadin coureur à pied et, cerise sur le gâteau, la pharmacienne de la ville… Avec tout ça ils auraient pu au moins lui accorder le bénéfice du doute !
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Où je veux en venir avec ma diatribe ? Eh bien ça fait une heure, Monsieur le boeuf-carottes, que vous me cuisinez aux petits oignons pour savoir à qui la faute de ce qui s'est passé - et si faute il y a. Mais moi je vais vous dire, notez-le bien sur votre petit carnet de ville bien propre qui n'a jamais foulé nos terres auparavant, afin que mon témoignage soit bien pris en compte avant le prochain drame : il y a bien une faute, et elle vient de la façon dont cette société marginalise les gens différents sans chercher à les comprendre ni à les insérer. Voilà ce que je pense. Vous avez compris ou vous voulez que je recommence ? Parce que je peux aussi demander à mon ami Nick1905 de venir témoigner si vous voulez, il vous racontera une histoire de taureau que même pas vous la croiriez !
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Comme vous voulez, Monsieur l'Inspecteur. Au revoir alors. Ah, pendant que j'y pense, où est votre collègue Sonia, la flic du challenge des perles littéraires chargée de contrôler que les bouquins demandés ont bien été lus selon sa loi et sans bavure ?
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Ah, dans ce cas, souhaitez-lui bonne chance dans son assistance à la brigade de recherche du dénommé Gabb classé « wanted » depuis plusieurs mois… Dites-lui aussi de remercier Marie-Caroline qui, ayant adoré ce bouquin, m'a demandé de le sortir de ma PAL dans le cadre du challenge, elle comprendra. D'ailleurs, vous pourriez le lire vous aussi. Qui sait ? Clic, PAN, vous aussi vous pourriez être touché… en plein coeur ;-)
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