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Critique de Arakasi


Vassili Alexandrovitch est un ancien « monstre » de l'URSS. Homme doté d'une intelligence aiguë et d'un fanatisme sans faille, il a été de toutes les guerres, de toutes les révolutions, de tous les gouvernements depuis la chute du tsarisme. Pendant plus de quarante ans, il s'est hissé à la force du poignet au sein du parti bolchévique, piétinant au passage alliés et amis. Mais l'âge est cruel et au début des années 80, le général Alexandrovitch n'est plus qu'un vieillard rendu muet par l'attaque cardiaque qui lui a paralysé le visage et rongé par le souvenir d'une femme qu'il a aimée et sacrifiée. Malgré tout, le vieux général reste une puissance au sein du parti et quand il invite une douzaine d'anciens « amis » à se joindre à lui pour une chasse à l'ours de trois jours au fin fond de la Pologne, nul n'ose refuser… Dans quel but ? Personne ne le sait et personne n'a d'ailleurs osé le lui demander.

Les voici donc tous réunis dans un somptueux palais isolé dans la campagne enneigée : certains sont russes, d'autres allemands, tchèques, roumains ou polonais. Certains ont connu la 2e guerre mondiale, d'autres sortent à peine de l'académie militaire ou politique. Mais ils ont tous comme point commun d'occuper ou d'avoir occupé des postes importants au sein des partis communistes de leurs différents pays. Les heures s'écoulent et au sein du petit groupe, la discorde s'éveille progressivement. Des souvenirs sont échangés, des vieilles rancoeurs sont réveillées et un sentiment d'intense malaise submerge petit à petit toute l'assemblée. La tension monte lentement juste au point culminant de la fameuse partie de chasse où… Argh Argh Argh Spoiler !

Après ce résumé où j'ai tenté (probablement avec un succès limité) d'être aussi évasive que possible, passons à mon appréciation personnelle : au cas où vous ne l'auriez pas compris, « Partie de chasse » est une petite merveille de tension et de glauquitude, une de ses oeuvres pour lesquelles le terme machiavélique semble avoir été expressément inventé. C'est également une des bandes dessinées les plus fascinantes qu'il m'ait été donné de lire, mélange de thriller psychologique et de récit historique parfaitement réussi. C'est prenant, d'une grande finesse psychologique et absolument passionnant pour peu que l'on s'intéresse à l'histoire de l'ex-URSS.

Parlons un peu du dessin puisqu'il s'agit tout de même d'une bande dessinée. Avant toute chose, je ne suis pas particulièrement fan du style de Bilal : je reconnais sans problème sa virtuosité, mais j'ai toujours trouvé que ces dessins avaient un petit quelque chose qui mettait profondément mal à l'aise. Autant dire que, dans ce cas particulier, ils sont parfaitement adaptés à l'intrigue ! Mention spéciale pour la galerie de personnages aux trognes toutes plus marquées et plus dérangeantes les unes que les autres, dominée bien entendu par la figure écrasante du général Alexandrovitch, vieux tigre en apparence brisé, mais bien plus dangereux qu'il n'y laisse paraître.

Pour finir cette critique qui commence un peu à s'éterniser, il est intéressant de mentionner que la bande dessinée est sortie en 1983, c'est-à-dire 6 ans avant la chute du mur de Berlin. Afin de commémorer cet événement, les deux auteurs ont ajouté une épitaphe à la fin de l'ouvrage. Et c'est fou à dire mais cet ajout a réussi à enrichir la bande dessinée – pourtant déjà une réussite en soit : ces mecs là ont réussi à faire de la poésie en parlant de soviétisme ! Moi, je dis chapeau bas !
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