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Critique de JHernand


Impressions de lecture
Un pavé : 772 pages, plus de 100 pages de notes et de bibliographie.
J'ai failli abandonner à plusieurs reprises mais à chaque fois quelque chose a ranimé mon attention dans la vie extraordinaire de ce génie de la physique.
On aurait pu aussi le sous titrer – Oppenheimer et (ou contre) le FBI – tant les démêlées avec cet organisme structurent majoritairement l'ouvrage. Un aspect qui est très bien mis en exergue dans le film mais parfois un peu fastidieux dans le livre, tant il est fouillé, touffu, tant le nombre de personnes impliquées est vaste.
Quelques chapitres sur l'appartenance ou non de Oppenheimer au parti communiste, sa participation ou non à la rédaction de documents sont un peu lassants car on reste dans l'hypothèse, la supputation ou la malveillance.

La personne par contre est captivante, gamin hyperactif et surdoué (comme on dirait à notre époque), première conférence de minéralogie à 12 ans. Etudiant introverti, aux problèmes psychologiques graves, mauvais manipulateur mais très vite brillant théoricien. La reconnaissance de son génie le transformera en véritable chef, au discours fluide et brillant, plus tard en véritable prêcheur pour une collaboration mondiale des données sur l'atome et contre la bombe H. Véritable « éponge culturelle » Oppenheimer séduira par sa culture la plupart des personnes qu'il côtoiera, y compris le général Leslie Groves, responsable de l'organisation militaire et de la sécurité de l'opération Manhattan.

Oppenheimer qui n'a jamais eu le prix Nobel contrairement à beaucoup de ses collègues était un visionnaire, promoteur d'idées et d'orientations, la vitesse de sa pensée, sa profondeur d'analyse et sa perception des conséquences d'une hypothèse ou d'un calcul en faisait une véritable locomotive pour toutes ses équipes. Beaucoup de ses élèves ou collègues ont ainsi pu élargir ou résoudre des problèmes à partir de ses propositions. Pour un scientifique c'est une énorme satisfaction de voir ses idées s'implanter, germer puis s'épanouir, parfois au dépend de sa propre carrière mais cela vous impose nécessairement comme un « maître ». Cela provoque aussi des animosités, des rivalités parfois et il en aura sa part, notamment avec Edward Teller le créateur de la bombe H.

Outre ses opinions de gauche et ses liens anciens et distants avec le parti communiste, ses démêlés avec le FBI, sont en grande partie l'aboutissement de la haine d'un individu rancunier et ambitieux Lewis Strauss, président de la Commission de l'énergie atomique et anti-communiste viscéral. Strauss, totalement en phase avec le maccarthysme de cette époque est un familier du célèbre J. Edgar Hoover, le patron du FBI. Sectateur de la suprématie américaine par la course à l'armement nucléaire, il n'aura de cesse de faire supprimer l'accréditation d'Oppenheimer et détruire l'homme.

Le livre illustre aussi deux autres aspects permettant de comprendre l'évolution de ce personnage hors du commun. La personnalité de son épouse, Kitty, d'une part, communiste engagée et soutien indéfectible de son illustre époux, en particulier dans les manifestations de faiblesse psychologique de ce dernier, sous le coup d'émotions intenses. le second point est l'antisémitisme rampant ou déclaré, aux Etats-Unis, qui permettra à certains journaux libéraux, lors de la « réhabilitation » d'Oppenheimer, de faire le parallèle avec l'affaire Dreyfus en France.

Si vous êtes prêts à affronter l'ouvrage, lisez le ou autrement allez voir le film qui illustre bien, l'enquête de la commission de l'énergie atomique et la période principale du projet Manhattan.

Et pour terminer, un conseil sur le même sujet et avec les mêmes protagonistes, l'excellent roman graphique « La Bombe », d'Alcante, L. F. Bollée et Denis Rodier, paru chez Glénat en 2020. Bon, 450 pages de dessins aussi. Mais passionnant aussi.
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