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Peggy Sastre (Traducteur)
EAN : 9782749176260
912 pages
Le Cherche midi (15/06/2023)
4.37/5   54 notes
Résumé :
« Le portrait captivant de l’une des figures les plus essentielles et paradoxales de notre histoire contemporaine. » — Christopher Nolan

Le génie est parfois une malédiction. Robert Oppenheimer fut l’un des plus grands physiciens de son temps. Peu d’hommes pouvaient rivaliser avec son intelligence exceptionnelle et sa fantastique intuition scientifique. Ce talent hors norme l’a mené vers l’invention ultime, capable d’éradiquer la planète : la bombe at... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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L'enfance de Robert Oppenheimer est une enfance choyée dans un milieu privilégié baigné de livres, de musique et de savoir qui le mènent logiquement à Harvard. Mais ces premières années sont marquées par des difficultés relationnelles et psychologiques et une tendance à la dépression. Bien que reconnu par ses pairs et ses professeurs comme doté d'une intelligence et d'une intuition exceptionnelles et ayant plutôt une haute idée de lui-même, le jeune homme semble manquer singulièrement de confiance en lui. Lors de son départ à Cambridge, où il découvre la physique quantique, il est encore très instable émotionnellement et il faut un séjour en Allemagne à Göttingen pour qu'il commence à s'épanouir.

Mais c'est de retour aux États-Unis, à Berkeley où il enseigne, qu'Oppenheimer tend vers l'ataraxie, la paix de l'esprit qui lui a tant fait défaut jusqu'à présent. À la même époque, la grande Dépression, l'Allemagne nazie et certaines de ses rencontres le poussent vers une conscience politique qui le rapproche du Parti communiste (sans jamais y être encarté semble-t-il). Une communauté d'opinion et une grande complicité avec son frère Franck, qui comme lui est polymathe, brillant physicien et communiste militant. Cependant pour Robert cette proximité avec les communistes pose un problème quand il s'agit, en 1942, d'intégrer et diriger le projet Manhattan en vue d'élaborer une bombe atomique. Oppenheimer s'engage alors à couper toutes ses connexions communistes afin de lever les réticences des républicains et de l'armée, convaincu qu'il est que la bombe est la seule façon de vaincre les nazis. le projet Manhattan est un choix évidemment lourd de conséquences pour le monde, et pour le physicien qui quelques années plus tard, malgré son engagement, sera victime des excès du maccarthysme.

Une biographie aussi volumineuse que précise et passionnante qui donne une idée de qui était Robert Oppenheimer, personnage complexe hors norme, plein de contradictions et de paradoxes, mais aussi des États-Unis au début de leur lutte contre le grand satan soviétique, avec une course à l'armement et le maccarthysme dont Garrison, un avocat d'Oppenheimer, parlera comme d'une hystérie anticommuniste qui a tellement contaminé les administrations Truman et Eisenhower qu'elle mènera l'Amérique à manger ses propres enfants. Ce qui fut le cas de Robert Oppenheimer...

Merci à Babelio et aux Éditions du cherche midi.
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Oppenheimer est un enfant surdoué qui excelle dans toutes les matières. Issu d'un milieu juif très aisé , il se révèle introverti voire asocial.
Il ne trouve sa voie que tardivement: la physique théorique, plus précisément la physique quantique qui est en plein essor dans l'entre-deux guerres, avec une ruche de physiciens éminents, brillants tous un jour ou l'autre Prix Nobel ou équivalent.
C'est dans ce vivier qu'Oppenheimer va s'épanouir et s'affirmer l'un des meilleurs voire le meilleur d'entre eux. C'est un humaniste très à gauche et ne s'en cache pas en soutenant financièrement par exemple les républicains espagnols à la fin des années 30.

Ainsi « naît » le père de la bombe atomique.
Il se voit confier la direction scientifique et technique du projet Manhattan, un projet scientifique qui devient un projet d'ingénierie d'ampleur, où Oppie passe du rôle du génie scientifique au manager conciliateur promouvant les échanges d'idées, les contradictions et le participatif.
Un incroyable challenge à plus d'un titre.
Il s'agit d'abord de diriger une équipe pluridisciplinaire et multi-culturelle avec des scientifiques et ingénieurs, tous brillants et ultra compétents, mais tous ingérables de par leur ego surdimensionné. Un challenge de planning. Etre prêt au plus tôt pour devancer les nazis.
Un challenge politique où les exigences du pouvoir contraignent les choix de recrutement et placent sur l'équipe un étau de confidentialité au nom de la sécurité nationale.
Les conflits de toutes sortes nous sont dévoilés… conflit d'intérêt, cas de conscience sont nombreux et intéressants pour appréhender les tenants de la nature humaine dans cette aventure hors du commun.
A Los Alamos, Oppie traite et résout les problèmes de toutes sortes, avec brio il survole les embûches.
Mais l'éthique le rattrape une fois le projet en phase d'exécution finale.
Le paroxysme est atteint avec les modalités d'utilisation de la bombe. Comment s'en servir? Comme arme de destruction massive? Comme arme de dissuasion? Comme arme diplomatique? Comme un capital mondial à sanctuariser?

La décision de Truman tombe sans discussion: utiliser le « gadget » avant le 15 Août 1945 pour couper l'herbe sous le pied des Russes.
J'apprends grâce à cette bibliographie:
a) la reddition annoncée des Japonais dès Juin, ceux-ci cherchant à négocier la paix;
b) l'accord Truman-Staline pour une déclaration de guerre russe contre le Japon avant le 15 Août
Malgré (ou à cause de) ces deux faits, Truman choisit la bombe pour s'assurer que le Japon ne se rende qu'à la seule Amérique et surtout pour asseoir une suprématie américaine post guerre incontestable.

Au delà du succès du premier essai Trinity, Oppenheimer et nombre de ses collègues éprouvent un sentiment de culpabilité énorme, une responsabilité historique.
Comme il l'avait deviné dès 1945, il a ouvert la course à l'armement avec l'URSS et la prolifération devient inévitable.
A cause de son opposition ouverte à la Super bombe, la bombe H, il va devoir faire face au lobby de l'Air Force, des industriels et financiers républicains et enfin, en plein maccarthysme, à une véritable chasse aux sorcières visant à le démolir.
Sa réhabilitation ne sera que trop pâle et trop tardive.

Je trouve les problèmes métaphysiques soulevés parfaitement résumés dans la formule de Rabelais: « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. »

C'est une remarquable autobiographie qui nous transporte dans les années de la toute puissance américaine avec tous ses travers, capable du pire comme du meilleur.
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Quelle lecture pour commencer 2024 ! Oppenheimer a vraiment eu une vie incroyable, et cette biographie en donne un aperçu encore plus saisissant que le film. J'avais été frustrée par certains aspects du film, qui oubliait l'enfance et la période post-« hearing » d'Oppenheimer et oubliait un peu tout le réseau de scientifiques sans qui la bombe n'aurait pas été inventée, mais ce livre n'a aucun de ces deux défauts. Cette trajectoire biographique donne tellement à réfléchir, autant sur le plan de son histoire individuelle que sur le plan philosophique/métaphysique.

J'ai été fascinée par plein d'éléments de la trajectoire individuelle d'Oppenheimer. Comment ses ascendants ont préparé le terrain de ce qu'il est devenu (notamment en lui donnant accès à une éducation pédagogiquement très novatrice pour l'époque j'imagine), et comment sa destinée ne lui a pas permis de reproduire cela avec ses propres enfants (j'ai été particulièrement touchée par l'histoire de sa fille Toni, sur qui j'aimerais bien en savoir plus, l'histoire de son fils a l'air aussi intéressante). Comment il a réussi à apprivoiser ses démons intérieurs et tendances dépressives tout au long de sa vie (même si j'aurais bien aimé en savoir plus sur sa vie intérieure post Los Alamos, mais les sources manquent sans doute). Son histoire d'amour avec Jean Tatlock, sa relation aux psy, sa capacité à jouer le rôle du leader alors même qu'il semble avoir une personnalité plutôt introvertie, etc.

Et sur le plan plus philosophique/métaphysique, cette biographie et son lien avec la bombe illustre à merveille le lien science/politique et donne énormément à réfléchir (voir l'extrait d'un entretien p. 735), tous ces questionnements sont encore tellement d'actualité… J'ai aussi beaucoup apprécié l'intérêt transversal d'Oppenheimer pour la Science (« dure ») et les humanités et sa conviction d'une nécessité de croiser les deux domaines (j'ai d'ailleurs découvert lors de cette lecture le terme ‘polymathe'). Et puis j'ai beaucoup aimé l'importance donnée aux réseaux scientifiques, on voit bien la science « in the making ».
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Impressions de lecture
Un pavé : 772 pages, plus de 100 pages de notes et de bibliographie.
J'ai failli abandonner à plusieurs reprises mais à chaque fois quelque chose a ranimé mon attention dans la vie extraordinaire de ce génie de la physique.
On aurait pu aussi le sous titrer – Oppenheimer et (ou contre) le FBI – tant les démêlées avec cet organisme structurent majoritairement l'ouvrage. Un aspect qui est très bien mis en exergue dans le film mais parfois un peu fastidieux dans le livre, tant il est fouillé, touffu, tant le nombre de personnes impliquées est vaste.
Quelques chapitres sur l'appartenance ou non de Oppenheimer au parti communiste, sa participation ou non à la rédaction de documents sont un peu lassants car on reste dans l'hypothèse, la supputation ou la malveillance.

La personne par contre est captivante, gamin hyperactif et surdoué (comme on dirait à notre époque), première conférence de minéralogie à 12 ans. Etudiant introverti, aux problèmes psychologiques graves, mauvais manipulateur mais très vite brillant théoricien. La reconnaissance de son génie le transformera en véritable chef, au discours fluide et brillant, plus tard en véritable prêcheur pour une collaboration mondiale des données sur l'atome et contre la bombe H. Véritable « éponge culturelle » Oppenheimer séduira par sa culture la plupart des personnes qu'il côtoiera, y compris le général Leslie Groves, responsable de l'organisation militaire et de la sécurité de l'opération Manhattan.

Oppenheimer qui n'a jamais eu le prix Nobel contrairement à beaucoup de ses collègues était un visionnaire, promoteur d'idées et d'orientations, la vitesse de sa pensée, sa profondeur d'analyse et sa perception des conséquences d'une hypothèse ou d'un calcul en faisait une véritable locomotive pour toutes ses équipes. Beaucoup de ses élèves ou collègues ont ainsi pu élargir ou résoudre des problèmes à partir de ses propositions. Pour un scientifique c'est une énorme satisfaction de voir ses idées s'implanter, germer puis s'épanouir, parfois au dépend de sa propre carrière mais cela vous impose nécessairement comme un « maître ». Cela provoque aussi des animosités, des rivalités parfois et il en aura sa part, notamment avec Edward Teller le créateur de la bombe H.

Outre ses opinions de gauche et ses liens anciens et distants avec le parti communiste, ses démêlés avec le FBI, sont en grande partie l'aboutissement de la haine d'un individu rancunier et ambitieux Lewis Strauss, président de la Commission de l'énergie atomique et anti-communiste viscéral. Strauss, totalement en phase avec le maccarthysme de cette époque est un familier du célèbre J. Edgar Hoover, le patron du FBI. Sectateur de la suprématie américaine par la course à l'armement nucléaire, il n'aura de cesse de faire supprimer l'accréditation d'Oppenheimer et détruire l'homme.

Le livre illustre aussi deux autres aspects permettant de comprendre l'évolution de ce personnage hors du commun. La personnalité de son épouse, Kitty, d'une part, communiste engagée et soutien indéfectible de son illustre époux, en particulier dans les manifestations de faiblesse psychologique de ce dernier, sous le coup d'émotions intenses. le second point est l'antisémitisme rampant ou déclaré, aux Etats-Unis, qui permettra à certains journaux libéraux, lors de la « réhabilitation » d'Oppenheimer, de faire le parallèle avec l'affaire Dreyfus en France.

Si vous êtes prêts à affronter l'ouvrage, lisez le ou autrement allez voir le film qui illustre bien, l'enquête de la commission de l'énergie atomique et la période principale du projet Manhattan.

Et pour terminer, un conseil sur le même sujet et avec les mêmes protagonistes, l'excellent roman graphique « La Bombe », d'Alcante, L. F. Bollée et Denis Rodier, paru chez Glénat en 2020. Bon, 450 pages de dessins aussi. Mais passionnant aussi.
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Un livre impressionnant. Rassembler autant d'informations sur l'un des pères de Trinity, était un travail titanesque : c'est fait. de sa naissance dans une famille aisée à sa mort, nous accompagnons Oppenheimer. de l'étudiant pas très doué (si c'est possible) à l'homme qui manipule les atomes, le chemin est long et complexe. Entendre la peur des américains de l'homme de gauche est consternant. Quand on voit où en est la Russie, c'est un autre monde. Il semble que simplement aider son prochain, vous propulse gauchiste aux USA. Il est vrai que dans le contexte post seconde guerre mondiale, tout est très tendu. Oppenheimer m'a semblé être un incompris sauf de ceux qui mesuraient le pouvoir dévastateur de l'atome et de la bombe. Aurait-il mieux traité en Europe ? Une biographie de référence à lire.
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Oppenheimer se démène pour qu'on comprenne la profonde inquiétude de ses collègues face à l'avenir. À la fin septembre il fait savoir au sous-secrétaire d'Etat Dean Acheson que la plupart des scientifiques du projet Manhattan ne sont pas du tout disposés à continuer leur travail sur des armes - et « pas seulement pour mettre au point une superbombe, mais n'importe quelle bombe ». Après Hiroshima et la fin de la guerre, un tel ouvrage est jugé « contraire aux commandements de leur cœur et de leur esprit ». Et comme il le cingle à un journaliste, il était scientifique, pas « fabricant d'armes ».
Tous ses homologues, bien sûr, ne sont pas de cet avis. Edward Teller en est encore à faire l'article de la « Super » à quiconque a assez de patience pour l'écouter.
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Personne ne peut savoir quelle aurait été la réaction d’Oppenheimer s’il avait appris qu’à la veille du bombardement d’Hiroshima, le président [Truman] savait que les Japonais « cherchaient la paix » et que le recours militaire aux bombes atomiques sur les villes tenait de l’option et non de la nécessité pour que la guerre se termine en août. Par contre, ce dont nous sommes certains, c’est qu’après la guerre, il jugera avoir été trompé et fera de cette conviction un pense-bête pour ne pas oublier l’obligation qui était désormais la sienne : se montrer sceptique face aux allégations des hommes d’État.
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Morrison avait atterri à Hiroshima à peine un mois après la livraison mortelle de l'Enola Gay. « Pratiquement tout le monde dans les rues sur près d'un kilomètre à la ronde, fut instantanément et gravement brûlé par la chaleur de la bombe, explique Morrison. Les effets ont été immédiats et étranges. Ils [les Japonais] nous ont parlé de personnes qui portaient des vêtements rayés et dont la peau fut brûlée en bandes. [...] Nombreux ont cru avoir eu de la chance lorsqu’ils sont sortis en rampant des ruines de leurs maisons pour ne se trouver que des blessures légères. Mais ils sont morts quand même. Des jours ou des semaines plus tard, à cause de la puissance du rayonnement généré au moment de l'explosion. »
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Derrière les barbelés, Los Alamos se transforme en communauté autonome de scientifiques, financée et protégée par l’armée américaine. […] Les lieux ont tout d’un camp militaire qu’on aurait mixé à une station de sports d’hiver. Juste avant son arrivée, Robert Wilson avait terminé la lecture de La Montagne magique de Thomas Mann et, parfois, aura l’impression d’avoir été transporté dans ce domaine merveilleux.
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Il [Oppenheimer] en est maintenant persuadé : un recours militaire à la bombe dans « cette » guerre a de quoi faire disparaître « toutes » les guerres. Comme Oppenheimer va l’expliquer, certains de ses collègues sont convaincus que larguer rapidement la bombe aurait de quoi « améliorer » les perspectives internationales, dans le sens de la focalisation sur la prévention de la guerre plutôt que sur l’élimination de cette arme spécifique.
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