J'ai un avis très mitigé sur ce roman. Disons que je possède autant de points négatifs que positifs à son égard, à tel point qu'il m'est impossible de dire si ce livre est une perle ou une déception... Je vais essayer de les expliquer point par point afin de vous faire comprendre mon avis.
Tout d'abord, l'un des points que j'ai le plus apprécié dans cette histoire est l'univers même de la série. Nous vivons dans un monde alternatif, à notre époque, mais façonné de manière totalement différente. Les noms sont à la fois proches et différents, les règles tout autant. J'ai aimé le côté sauvage de l'histoire : ici, c'est la loi de la jungle. Les forts dominent et bouffent les plus faibles, la cohabitation sur cette même terre se fait avec méfiance et sans égalité. Par conséquent, pour les terra indigene (les créatures surnaturelles de ce monde), les humains ne sont que de la viande. Ils tolèrent leur présence s'ils s'avèrent utiles mais au moindre soucis, ils les mangent, un peu comme le lion dans la savane qui cohabitent plus-ou-moins avec les autres animaux... jusqu'à ce que sonne l'heure du repas. Pour un bit-lit, cela sort des sentiers battus et c'est véritablement un bon point, une bouffée de fraîcheur dans les éternels romans déjà-vu dont il est difficile de sortir.
Les choses commencent légèrement à changer avec la venue de Meg Corbyn. Ce qu'il faut comprendre de cette femme c'est qu'elle est humaine, certes, mais ne connaît rien de la vie – du moins, d'un point de vue pratique. Elle a toujours vécu dans une cage de fer peinte en dorée, a appris la vie des hommes et des surnaturels via des vidéos. Exploitée toute sa vie à cause de ses dons de voyance, elle est donc comme une enfant quand elle parvient à s'enfuir pour rejoindre un Enclos, la partie délimitée d'un territoire où vivent les terra indigene. C'est là que les choses deviennent à la fois dérangeantes et passionnantes. Comme on peut le deviner, elle va tenter de s'intégrer dans l'Enclos afin d'échapper à ses poursuiveurs. Cependant, son intégration auprès des différentes classes terra indigene se fait de manière beaucoup trop facile ; toutes les portes s'ouvrent les unes après les autres devant elle et très vite elle se fait accepter. C'est notre héroïne, d'accord, et elle n'agit pas comme les autres humains, d'accord... Mais tout de même ! Devenir aussi vite sous la protection du chef de l'Enclos puis sous le chef des Sanguinati (les vampires de cet univers), copiner avec les Élémentaires alors que même les autres terra indigene craignent un peu leurs sautes d'humeurs... Oui, mais non. Toutes ces relations vont certes lui servir à échapper à ses ravisseurs plus tard, mais non... ça ne me paraît pas logique. Encore une fois, je comprends qu'elle soit différente des autres humains, qu'elle représente une source de distraction pour les Autres, mais ça ne me paraît pas réaliste, absolument pas du tout, voire même forcé pour mettre en valeur l'héroïne, alors que, en contre-partie, comme je l'ai expliqué plus haut, les attitudes des surnaturels et des humains est effrayant de réalisme dans ce monde sauvage. À tout moment, un humain peut se faire dévorer (et se fait dévorer, même ; âmes sensibles s'abstenir !). Même Simon menace Meg de la dévorer à plusieurs reprises mais non, aucune agression de sa part, juste des menaces pour correspondre à son personnage.
En parlant des personnages, parlons de Meg. Parfois, son manque de réaction me paraît trop calculé par le narrateur, encore une fois peu réaliste. Comme si elle savait d'avance que si elle réagissait « normalement », cela ne lui servirait à rien pour le but de l'auteur qui est de la faire copiner avec tout le monde. Certains éléments en deviennent même un peu trop prévisibles et irréalistes, comme avec Sam par exemple, le louveteau traumatisé qui sort, comme par hasard, de son mutisme de deux ans parce que Meg vient le voir. Avant même leur rencontre, je savais que ça allait se passer ainsi (sans les détails, évidemment). de ce côté-ci, je suis donc encore une fois un peu déçue... Par contre ! L'absence réelle de romance dans ce premier tome est un plus à apprécier ! Certes, on sait tous que la romance va réellement se construire à partir du tome 2, c'est dans la continuité des choses, c'est même plutôt logique vu l'attitude de Simon par rapport à Meg, mais au moins, l'auteur ne nous a pas fait tombé dès le début dans la niaiserie romantique, juste parce que c'est du bit-lit, et que Simon est un loup, et que Meg est l'héroïne. Vu l'attitude des humains et des surnaturels, il me paraît logique et bienvenu que les choses se déroulent lentement de ce côté-là.
Enfin, un nouveau point pas trop à l'avantage de l'auteur : la manière dont est raconté l'histoire. Les lectures de Milady sont, en général, destinées à de jeunes femmes adultes et, pourtant, avec ce texte, j'ai eu l'impression de lire de la jeunesse... Je m'explique : pour commencer, le prologue est une explication de la construction de cet univers et non pas une narration incluse de manière fluide et logique dans l'histoire. (Vous avez lu Les Chevaliers d'Émeraudes ? Vous vous rappelez les explications de début de chacun des tomes ? Eh bien voilà !) de plus, même si les intrigues sont intéressantes en soi, elles sont divulguées de manière bien trop rapide et sans suspense. Jamais. Aucun. Problème page 1, solution page 2. Ou ce schéma : personnage page 1, divulgation sur ses intentions page 2. Ou encore : questionnement page 1, résolution page 2. Durant toute ma lecture, j'ai eu l'impression que le narrateur jouait chacun des personnages de l'histoire, que, comme il savait tout, dès qu'il se mettait dans la peau de l'un de ses personnages, le personnage en question obtenait une mémoire universelle et parvenait à deviner précisément ce qu'il fallait savoir pour agir comme le souhaiterait l'auteur, comme un dieu dirigeant cet univers pour venir là où il veut. Par conséquent, ça va trop vite, nous n'avons pas le temps, nous autres lecteurs, de nous poser les questions, de nous demander comment ils vont passer ce nouvel obstacle. C'est inutile : savoir universel.
Je ne souhaite pas m'attarder davantage sur les personnages, mon avis les concerne dans leur ensemble ; il s'agit des mêmes problèmes, facilité d'acception plus-ou-moins, désir de protéger Meg, méchants mais pas méchants, sauvages mais pas brutaux, attentifs et intrigués, etc... Seule exception, mon intérêt pour Tess, dont on découvrira l'espèce qu'à la toute fin du tome. le personnage en tant que tel ne m'a pas beaucoup marqué, bien qu'elle fut du genre atypique, mais bon... En réalité, le seul élément qui m'a plu en elle est la possibilité qu'il existe d'autres espèces surnaturelles dans cet univers que les six ou sept évoquées dans ce récit. Cela enrichirait l'histoire en tout cas.
Bref, une histoire plutôt sympathique mais pas transcendante. Une histoire qui donne envie de lire la suite mais qui est surclassée par rapport à sa véritable valeur (ou son véritable public). Une histoire qui, malgré le peu de points que je suis capable de lui donner, me donne tout de même envie de lire la suite.
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