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Critique de glegat


Nous voici projetés en 1910 dans l'intimité d'une famille bourgeoise, dont le maître de maison, Marc Romenray est architecte. Dès le premier chapitre, on est saisi par l'atmosphère à la fois pesante et rassurante magistralement décrite par l'auteur. On se voit dans cette maison de deux étages entourée d'un jardinet bien entretenu. Cette maison me fait penser aux belles demeures bâties en pierres meulières que l'on peut voir encore aujourd'hui dans les banlieues parisiennes. Elles offrent leur façade massive aux regards des passants qui s'attardent un instant pour mieux apprécier le charmant décor végétal qui les entoure. À l'intérieur on trouve tout le luxe et les commodités nécessaires à une vie confortable exempte de tracas matériels à une époque ou le téléphone et l'électricité étaient un luxe. Marc Romerey rentre chez lui et y retrouve sa pétillante petite fille Juliette. Tout irait pour le mieux s'il ne manquait la présence de la mère. On apprend rapidement qu'un drame se joue loin d'ici en Suisse. Marc reçoit un télégramme l'informant que sa femme, Thérèse, est soignée dans l'Hospice du Grand-Saint-Bernard à la suite d'une chute dramatique dans une crevasse au cours de laquelle son amant est décédé. Thérèse est entre la vie et la mort, elle a juste eu la force de réclamer son mari à qui elle veut parler. C'est le point de départ d'un roman à l'écriture envoûtante et qu'on a du mal à lâcher. Après chaque pause de lecture, on reste sous le charme du style tout en finesse d'Henry Bordeaux qui décrit à merveille les tourments de l'amour et de la trahison. Un roman sentimental donc, mais aussi un roman sur le pardon et sur les moeurs. L'auteur dépeint avec justesse le milieu bourgeois du début du XXe siècle ainsi que la psychologie des personnages, leurs doutes, leurs désirs, leurs espoirs. On est transporté dans les différents lieux de villégiatures des personnages et l'on capte parfaitement bien l'ambiance de l'Hospice du Grand-Saint-Bernard et de sa grande salle de restauration ou son accueilli avec bienveillance les voyageurs de passage qui apportent en plus de leurs bagages le poids de leur histoire personnelle.

Un très bon roman dont je souhaiterais prolonger l'émotion qu'il m'a procurée en lisant d'autres oeuvres de l'auteur. Mais Henry Bordeaux (1870-1963) fait partie de ces immenses auteurs tombés en désuétude et ses oeuvres sont difficiles à trouver. Son oeuvre comporte une cinquantaine de romans, des nouvelles, des poésies, des études critiques et historiques ainsi qu'une monumentale autobiographie en 13 volumes (histoire d'une vie). Défenseur de la famille et des traditions religieuses il est élu membre de l'Académie française en 1919,, auteur à succès oublié, « La neige sur les pas » est l'un de ses premiers romans et sans doute le plus célèbre, il a fait l'objet de deux adaptations au cinéma, l'une en 1923 (film muet d'Henri Eliévant) et l'autre en 1942 d'André Berthomieu avec Pierre Blanchar et Michèle Alfa dans les rôles principaux.

Un livre très bien construit au style un peu désuet, mais tellement ensorcelant qu'il imprègne le lecteur d'une belle émotion littéraire. C'est incontestablement l'oeuvre d'un maître écrivain.

Que lire après cela pour prolonger le charme ? Élisabeth Goudge, Jane Austen, les soeurs Brontë, Balzac ?


— « La neige sur les pas », Henry Bordeaux, Plon le livre de poche (1969), 253 pages.
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