Le Cimetière du diable

Tandis que la cabine de l’ascenseur descendait au rez-de-chaussée, Sanchez priait pour qu'Elvis trouve un moyen de les sortir de la fâcheuse posture dans laquelle ils se trouvaient. Elvis devait forcément savoir comment se débarrasser d'un cadavre et se disculper d'un homicide. Après tout, ça faisait partie de son boulot. Il devait bien exister une méthode éprouvée pour régler ce genre de problème.

Bien que surpris de voir des morts-vivants s'attaquer à lui, il avait eu le professionnalisme de repousser cette observation dans un coin de son cerveau pour se concentrer exclusivement sur l'extermination de ces enfoirés. Plus tard, il aurait tout le loisir de se demander ce qu'ils foutaient dans ce désert. (...)
Dans la plupart des films de zombies qu'il avait vus, les morts vivants avaient une très nette tendance à traîner des pieds avec un air ahuri, les bras tendus (...), en marmonnant toujours les mêmes mots (...).

Elvis acquiesça fermement. Il était évident que, malgré son assurance quasi surhumaine, les quelques compliments de Sanchez étaient plus que bienvenus.
- Merci, Sanchez. C'est sympa. Mais ça change pas grand-chose : c'est baisé pour moi. Et tu sais quoi ? Quand j'étais sur scène, là, en train de chanter, quelque chose m'a frappé.
- Putain, mec. J'ai même pas remarqué.
- Mais non, espèce de con. Je veux dire que je me suis rendu compte d'un truc. Ce sosie d'Otis Redding, Sanchez, ce serait pas par hasard un des types dont la photo se trouvait dans cette enveloppe marron ?

Depuis toujours Gabriel aimait les temps froids. Le fait de sentir la peau de des bras rougir et de contracter lui donnait l'impression d'être vraiment vivant.

La blonde en minishort doré leva les bras au ciel en couinant : « Oh mon Dieu, Jonah ! Ca va ? ». Elle se pencha vers lui afin de voir comment il allait. Ses talons aiguilles de 15 cm et le poids de ses prothèses mammaires lui compliquaient considérablement la tâche, elle s’appuya d’une main contre la poitrine de Clementine afin de ne pas perdre l’équilibre. Il ne réagit pas. Après lui avoir tapoté les joues dans l’espoir de le réveiller, elle releva les yeux vers le Kid.
« Il est inconscient ! dit-elle d’un ton accusateur. Vous l’avez mis KO !
- Il est pas inconscient.
- Bien sûr qu’il l’est. Il ne bouge plus ! »
Le Kid aspira à travers le filtre de sa cigarette, et celle-ci s’alluma soudain. Puis il répliqua dans un grognement : « S’il était inconscient, son cœur battrait encore. »

- je veux rentrer chez moi
Le Bourbon Kid sentit une boule se nouer dans sa gorge, et il ne put s’empêcher de porter sa main libre à sa propre bouche. Emily lui rappelait tellement Beth, la fille qu'il avait aimé et perdue dix ans auparavant.

- Tu sais, c'est pas moi qui ai écrit la Bible, et, aux dernières nouvelles, Dieu m'a pas appelé pendant la rédaction pour me demander conseil.

- ça va, Sanchez ?" demanda une voix plus familière.

Elvis était assis à sa gauche.

- J'ai un de ces putains de mal de crâne, geignit Sanchez pour éveiller l'empathie de son ami.

- Apparemment, tu t'es assommé toi-même.

- Pourquoi j'aurais fait ça ?

- Parce que tu es un putain d'abruti.

- Ah ! Tout s'éclaire, effectivement.

- N'empêche, tu es complètement à côté de la plaque. John Belushi était blanc.

- Michael Jackson aussi.

(...)

Il attendit que les informations soient bien enregistrées par le cerveau de Jacko, puis ajouta de ce ton rocailleux qui lui était caractéristique :
- Si tu essayes de t'esquiver, je te retrouverai et je te ferai un nez identique à celui du vrai Michael Jackson.

- Chéri, mon chat chante aussi bien, lança Lucinda, d'habitude plus sympathique.

Afin de ne pas rester en reste, Candy enchaîna aussitôt :
- Mon chat chante mieux que ça !

Nigel administra le coup de grâce dans un profond soupir :
- Je crois que mon chat vient de se pendre en vous écoutant.