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Critique de Lucilou


J'ai toujours été un peu fascinée par les années 90 pour lesquelles j'ai un faible, une affection particulière alors que je les aies peu connues. Je ne devrais pas en avoir la nostalgie... Elle ne devrait pas être cette jolie tristesse qui arrive souvent par bouffées, pas à ce sujet-là. Elle ne m'appartient pas. Et pourtant. Les années 90 et moi, c'est un peu comme la chanson de Thérapie Taxi voyez-vous, mais ce n'est pas de ma faute. Non.
C'est de la faute aux photos de famille et à l'admiration que j'ai longtemps éprouvé pour ma tribu de cousins.
Je suis issue d'une famille nombreuse: mon père était le dernier d'une fratrie de huit enfants et lorsque je suis arrivée en 1988, le plus jeune de mes cousins avait huit ans.
Lui et les autres étaient de vrais enfants des années 90, sinon des années 80 quant à moi et ma petite soeur, les deux seules échouées de notre génération. On a eu de la chance: nos cousins se sont beaucoup occupés de nous, nous ont aimées, chouchoutées. Nous leurs devons nos premières vacances sans parents, d'inoubliables séances de cinéma, des sorties au bowling ou à la patinoire, nos premiers concerts en fosse, des soirées crêpes et jeux de société... le bonheur pour nous qui les adorions et les adorons encore. Ils étaient nos modèles. Je rêvais de copier le look de mes cousines et d'être aussi brillante que mes cousins. de tout cela pourtant découlait aussi un petit pincement au coeur, parce que parfois, ils sortaient sans nous (et heureusement!), parce qu'avant nous ou avant qu'on puisse se souvenir, ils avaient eu une vie, des souvenirs communs qui s'étalaient dans les albums photos ou dans les conversations et pour moi, cette vie, ces références, tout ça devait être tellement bien!
Et puis, pour moi les années 90 furent celles de l'enfance, l'âge d'or avant l'entrée au collège et l'adolescence à l'orée des années 2000.

"L'odeur de la colle en pot" a donc titillé sans trop de difficulté ma fibre nostalgique et je l'ai dévoré en une soirée.
C'est un roman qui ne brille pas par sa complexité ou sa recherche stylistique , ni par sa forme mais dont le fond cache sous son apparente simplicité beaucoup de sensibilité, des thèmes graves abordés avec délicatesse. A travers le personnage de Caroline, Adèle Bréau parvient à saisir puis à restituer avec beaucoup de talent et de finesse toute une époque -ses parfums, ses références, sa "patte"- ainsi que l'instant de bascule entre l'enfance et l'adolescence, entre insouciance et gravité nouvelle. le passage de la frontière est dépeint avec une espèce de mélancolie tour à tour légère et douloureuse, avec beaucoup d'authenticité aussi et c'est réussi.

1991. Caroline a 13 ans. Elle vient de rentrer en 4° dans un nouveau collège dans lequel elle peine à s'intégrer jusqu'à sa rencontre avec Vanessa qui devient sa meilleure amie. Les blagues au téléphone succèdent alors aux booms, les cours s'étirent -interminables- malgré les petits mots esquissés sur les agenda et les sorties se négocient, les conversations téléphoniques sont à moitié clandestines et soumises aux oreilles des parents qui n'ont pas trouvé mieux que de brancher le téléphone dans leur chambre. Peu-à-peu pour Caroline, un nouveau quotidien se dessine, un quotidien au coeur duquel le beau David gagne sa place à coups de rendez-vous secrets et de chansons des Doors et elle a bien besoin car à la maison, la famille se délite. Son père rentre de plus en plus tard et de moins en moins souvent, accaparé par son nouveau travail qui les ont contraint à déménager, sa mère passe son temps à dissimuler ses yeux rougis derrière un sourire de commande. Quant à sa petite soeur...
Au cours de cette année, qui passe si vite, tout change pour Caro.
Un an, des promesses d'éternité et soudain, l'âge adulte et des souvenirs enfermés dans une boîte et dans l'odeur d'amande de la colle en pot.

Un joli roman initiatique doublé d'un portrait touchant d'une famille en proie à l'incertitude et de celui de toute une époque racontés à hauteur d'adolescente.
Il ne manque pas grand chose à "L'odeur de la colle en pot" pour être bouleversant: peut-être qu'il lui aurait fallu un peu moins de grâce, de douceur et un un peu plus de révolte. Peut-être aussi qu'il est un peu trop court… Moi j'en aurais voulu davantage.
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