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Critique de JG55


"Agnès Grey" fut une belle découverte à la fois de la romancière, Anne Brontë, et de son premier roman. J'avais bien aimé même si le livre, dont la thématique était assez proche de "Jane Eyre", ne peut guère rivaliser avec le chef d'oeuvre de sa soeur Charlotte.

Rien à voir avec "Agnès Grey" qui avait un peu tendance à marcher sur les platebandes de ses soeurs, Charlotte ou Emily. Là, le roman est beaucoup plus abouti et évoque l'itinéraire d'une jeune femme mal mariée.

J'ai eu un peu peur au début du roman en découvrant au premier chapitre la forme "épistolaire" que j'apprécie en général très peu. En effet, je trouve que le roman épistolaire, par sa forme, manque souvent de liant entre l'interrogation posée par l'un dont il faut systématiquement attendre la réponse de l'autre parfois des dizaines de pages plus loin et où on navigue à travers les différents courriers, qui se croisent toujours, des (trop) nombreux personnages.

Mais, ouf, ici, ce n'est pas le cas. Certes, un des deux personnages principaux, Gilbert Markham, s'adresse à son beau-frère et lui raconte par le menu son histoire sous forme de lettres. Sauf qu'il n'en attend aucune réponse. On est un peu dans le genre de la confession. du coup, cette étrange façon de faire, qui est habile pour présenter les scènes, ne gêne pas du tout la lecture de cet épais roman de plus de 560 pages (en livre de poche).

Toujours d'un point de vue de la forme, le roman est construit comme un long monologue de Gilbert qui s'interrompt pour inclure le journal intime de Helen, la dame du manoir, constituant ainsi un deuxième (long) monologue imbriqué dans le premier.

Et non seulement, cette forme ne gêne pas la lecture mais génère une grande curiosité et une formidable empathie vis-à-vis de ces deux personnages. C'est encore un de ces romans qu'on quitte difficilement après l'avoir commencé.

Pour l'époque, je pense que le sujet du roman fut innovant. D'ailleurs, il fit l'objet de nombreuses critiques défavorables parce qu'il présentait une femme qui osait affirmer sa personnalité face à son mari qui la trompait et était, de plus, alcoolique. La totale. Elle se montrait capable de tenir tête à sa famille et aux hommes, d'une façon générale, à son mari, en particulier. A cette époque, un tel renversement des références dans la relation homme/femme est impensable. On le voit d'ailleurs très fréquemment chez Austen et Brontë dans les problèmes omniprésents du devenir des femmes et de leur progéniture lors des successions où les femmes, les épouses, n'ont quasiment aucun moyen de faire valeur leurs droits.

Spoiler : Lorsque le ménage tourne à la catastrophe du fait du comportement inapproprié de son mari, Helen n'hésitera pas à fuir avec son fils et se réfugier dans le fameux manoir de Wildfell Hall. Légalement, elle courait certainement le risque de tout perdre y compris la garde de son fils. Même si les torts étaient visiblement du côté du mari.

En cela, "la Dame du manoir" est un roman qui sonne de façon moderne avec le très beau personnage d'Helen qu'on découvre peu à peu et qu'on apprécie de plus en plus. Sans vouloir mettre d'étiquette sur son personnage, il est clair que les propos d'Ann Brontë dans son roman sont en avance par rapport à l'époque victorienne. Il fallait donc un certain courage à Ann Brontë pour aborder des sujets comme l'émancipation de la femme par rapport à son mari, la place de la femme dans la société ou comme l'alcoolisme.

C'est certainement un roman que je relirai à l'occasion.
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