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Critique de PhilippeCastellain


Résumons cette lecture en deux mots : pauvre Charlotte Brontë ! Ce livre, elle l'écrivit de retour de Bruxelles, où elle séjourna dans un internat pour développer ses connaissances en langues. Elle y resta presque deux ans, d'abord avec sa soeur Emily en tant qu'élèves, puis seule en tant que professeur d'anglais. Elle y tomba amoureuse du directeur, Constantin Héger, qui malheureusement était marié. De retour en Angleterre elle écrivit ce roman, son tout premier, qui fut refusé par tous les éditeurs et ne parut qu'à titre posthume. Et malheureusement… On comprend pourquoi.

Le narrateur, un jeune homme d'origine aristocratique mais réduit à la pauvreté, cherche protection auprès d'un frère ainé qu'il connait à peine. Ce dernier lui procure un emploi dans son usine, mais développe une violente haine à son égard, et le lui fait sentir. Un jour il se fait un ami singulier du nom de Hunsden, qui l'insupporte au plus haut point mais dont il suit le conseil : donner sa démission et partir vivre à Bruxelles. Là, il trouve un emploi de professeur d'anglais dans une école privé pour garçon. Un pensionnat pour jeunes filles voisin sollicite également ses services. L'une des professeurs, une jeune fille pâle et timide, demande à pouvoir également assister à ses cours. Il découvre qu'elle est d'origine anglaise…

Disons le tout net, le héros est l'un des plus imbuvables de toute la littérature. Asocial, hautain, d'une morale digne d'un bloc de marbre en Antarctique, il affiche le mépris le plus total pour les catholiques « d'une nature corrompue et immorale » et les Flamands « lourdauds de corps et d'esprits », et plus généralement pour tout ce qui n'est pas purement britannique. Un regard en coin est pour lui d'une débauche éhonté ; les jeunes filles du pensionnat lui semblent d'une grande dépravation d'esprit. Dans ces conditions, son idylle ressemble à l'amour entre un ours blanc et un iceberg.

Qu'avons-nous derrière tout cela ? Jusqu'au départ pour Bruxelles, une première partie excellente nous présentant un jeune homme d'autant plus malade de fierté qu'il vit dans une misère noire, menant une vie morne et dénuée de tout plaisir ou d'espoir. Un personnage génial, Hundsen, plein d'ironie et de sarcasme. Et après… Toute la tristesse de la vie de Charlotte. La pauvreté et la fierté du professeur, c'est la sienne. La jeune fille timide, maladive, souffrant du mal du pays et de la solitude… C'est elle. Et dans le professeur au regard dur et à la critique impitoyable, on reconnait sans peine Constantin Héger. On a envie de lui dire : « non très chère, corriger sèchement les fautes d'orthographes de quelqu'un n'a jamais été et ne sera jamais une technique de séduction !»

Et puis, l'on pense à la jeune fille ayant grandi dans le deuil, seule loin de son pays et de sa famille, amoureuse d'un homme marié et de surcroit catholique – autant dire vivant sur une autre planète… Et on lui reconnait bien le droit de rêver un peu. du moins si vous êtes un pur fan des Brontë, car sinon mieux vaut passer votre chemin.
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