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Critique de ecceom


L'Amérique des Bill

A priori, l'enfance "fabuleuse" (dans tous les sens du terme) vécue dans l'Amérique des années 50 par Bill Bryson ne me concernait pas plus que ça.

La localisation géographique d'abord.
Je ne suis pas américain (voire à peine français) et de plus, l'Amérique du petit Bill, c'est Des Moines dans l'Iowa. Autrement dit : nulle part.

Mais comme le précise Bryson, "il est difficile aujourd'hui de se représenter à quel point le monde était vaste à l'époque...Ce n'est pas seulement que l'Iowa était loin de tout, c'est que tout était loin de tout".
A l'heure de notre village planétaire, il est bon de se souvenir de cette réalité.

L'époque, ensuite.
Je dois avouer que je ne soupçonnais pas l'existence d'une vie réelle avant les années 60. Car enfin, une période qui n'a pas vu naitre les Beatles et votre serviteur (par modestie, je n'insisterai pas sur le lien pourtant évident et l'influence des uns par l'autre), est-ce vraiment sérieux ?

Et pourtant, j'ai éprouvé une bouffée nostalgique à la lecture de ce roman.

Il faut dire que compte tenu du décalage permanent d'une dizaine d'années entre les 2 bords de l'Atlantique, cette vision US des fifties, m'évoque aussi des souvenirs.

Je reconnais donc un peu cette vie marquée par l'irruption des appareils électroménagers, la télévision, l'inconscience écologique, les délires scientifiques ("Les responsables des années 50 nous avaient concocté un monde dans lequel à peu près tout était bon pour la santé" : apéros, cigarettes, rayons X, additifs, conservateurs...), la liberté laissée aux enfants ("La vie des Petits où que vous alliez, c'était sans surveillance, sans régulation, extrêmement physique -parfois à la limite de l'inconscience")...L'âge d'or des classes moyennes.

Comme d'habitude, Bryson mélange des souvenirs réels et magnifiés, procède à une radioscopie de l'Amérique chiffres à l'appui et se débrouille pour rester drôle et juste en permanence. le livre est découpé en 14 chapitres, chacun introduit par un extrait d'un des journaux de Des Moines (relatant des faits plus absurdes les uns que les autres).

Il faut lire ce passage où Bryson père, pourtant radin notoire, amène sa famille à Disneyland :
" Comme le vendeur lui tendait les tickets, il se tourna vers nous avec un grand sourire et nous fit coucou de la main.
- j'ai une leucémie, c'est ça ? demandai-je à ma mère.
- Non, mon chéri, répondit-elle.
- C'est papa qui a une leucémie ?
- Non chéri, personne n'est malade. Ton père a été touché par l'esprit de Noël, c'est tout,"

En toile de fond de l' Amérique insouciante de sa jeunesse, la réalité n'est pourtant jamais loin : les missiles de Cuba ou la ségrégation raciale (peine de mort pour un jeune domestique noir accusé d'avoir volé 1,95 $ à une "blanche", le lynchage d'Emmett Till -cf. la chanson de Bob Dylan), le Maccartysme...et même un rappel qui résonne de manière contemporaine : "C'était décidément une période formidable pour tous les crétins qui voulaient faire parler d'eux". Comme Billy James Hargis, un évangéliste dont les discours recueillaient une audience considérable, tout comme ses nombreux ouvrages aux titres évocateurs, du genre "l'école est-elle le bon endroit pour enseigner la sexualité ?"

D'ailleurs, au fur et à mesure que notre petit Bill s'éloigne de l'enfance, quitte son costume de "Thunderbolt Kid" le super-héros et s'éloigne de la planète Bizarro, le monde réel reprend ses droits.

Bill grandit, ses parents vieillissent et meurent, ses copains se rangent, les cinémas, les restaurants, les boutiques de centre-ville ferment...Fin de l'enfance insouciante.

Dream Is Over.
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