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Critique de Melpomene125


« le soleil, comme la mort, ne se peuvent regarder en face », disait La Rochefoucauld. Il y a un peu des deux dans L'Étranger. Meursault devient un meurtrier à cause du soleil et le récit commence avec la mort de sa mère.

J'ai croisé la route de Camus à l'adolescence et j'ai bien aimé ce roman car, comme dans ceux de Dostoïevski, je trouvais que l'auteur osait aborder des questions existentielles et métaphysiques qui me taraudaient : Dieu, le sens de la vie humaine, la mort, les conventions sociales auxquelles il sied de se plier pour ne pas être rejeté, exclu…

Camus trouvait d'ailleurs que Les Frères Karamazov est un chef-d'oeuvre, avis que je partage pleinement, ce fut un coup de coeur littéraire pour moi, et il a adapté au théâtre le roman Les Possédés. Raskolnikov dans Crime et Châtiment aime sa mère et sa soeur, ainsi que Sonia, cet amour l'obligera à faire certains choix, presque malgré lui. Meursault est, pour moi, un Raskolnikov qui ne vit pas cet amour qui change la donne et le comportement.

L'Étranger est un roman assez court qui se lit facilement mais il est très riche. Il est possible de le lire et de le relire des années après, d'en avoir des interprétations différentes, d'y voir ce que l'on veut bien y voir en fonction de sa sensibilité… ou de son insensibilité comme Meursault.

À seize, dix-sept ans, alors que le dossier scolaire de mon édition me parlait de « nature et société, de la justice, de l'absurde, du titre, de la structure, du personnage » etc., je me posais des questions sur le sens de la vie, la mort, Dieu : est-ce qu'il existe ou pas, ou est-ce comme le Papa Noël, une jolie histoire qu'on raconte aux enfants ? Et la mort : à quoi bon construire quelque chose puisque au final tout va disparaître et nous avec ? À moins que…

L'Homme rêve d'immortalité et, maintenant, il se tourne vers le transhumanisme. Alors, plus besoin d'être révolté, comme Meursault à la fin, par la mort et les mensonges que l'aumônier lui raconte sur « l'autre vie » à laquelle il devrait croire. Il devrait la voir derrière les pierres du mur de la prison mais Meursault est un rebelle, un esprit fort, un athée. Non décidément, il ne voit rien. le prêtre insiste : « C'est ce visage qu'on vous demande de voir. » Meursault ne voit toujours rien et, pour lui, cela n'a aucune importance car peu importent nos croyances, nos convictions, nos Dieux, nos absences de Dieux, nos révoltes, notre indifférence, nos cris de haine le jour de son exécution, nous irons tous au même endroit que lui. Nous sommes tous condamnés à mourir et donc sans doute tous coupables comme lui, sinon pourquoi serions-nous condamnés à mourir ?

Les romans de Camus sont brefs, énigmatiques et source de réflexion. Il n'a pas peur d'aborder des sujets tabous qui sont au coeur de la condition humaine, une condition tragique mais « philosopher, n'est-ce pas apprendre à mourir » ?
Lien : https://laurebarachin.over-b..
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