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Critique de Godefroid


Pour le dire tout de go: on a un peu de mal à reconnaître la patte du maître du hard boiled italien dans cette livraison. le roman est certes nerveux, court et bien troussé, mais génère un certain nombre de frustrations.

Une dizaine de jeunes criminels de tous horizons géographiques et de cultures fort différentes se retrouvent à Marseille avec l'espoir de se faire oublier tout en briguant fortune au passage, histoire de joindre l'utile à l'agréable. Mais tous finiront essorés par cette ville emblématique, capitale de renom de la pègre française. Car si certaines factions s'opposent, si des flics pas très nets poursuivent des objectifs peu avouables en usant de moyens qui le sont encore moins, l'auteur dessine petit à petit le personnage de la ville elle-même, qui devient une espèce d'ogre auquel il est dangereux de se frotter si on n'en a pas préalablement une connaissance intime.

Trop de personnages dans ces 200 pages d'une trop grande nervosité. Tous ne se définissent finalement que par leur capacité à intriguer, à manipuler, à torturer, à tuer. Les dialogues sont toujours très efficaces, même s'il est impossible – avec toute la bonne volonté du monde – de reconnaître le vocabulaire des petits trafiquants des quartiers nord dans les mots que Carlotto / Quadruppani mettent dans leur bouche ; on peut certes passer facilement là dessus. Ce roman est un tourbillon dont on ressort étourdi et sur notre faim. Outre le fait que rien n'est fait pour susciter la sympathie chez aucun d'entre eux (un parti pris tout à fait respectable, habituel chez Carlotto), on ne fait que survoler ces échantillons d'humanité déviante, malheureusement très crédibles.

Je retiendrai personnellement, dès le premier chapitre, quelques paragraphes saisissants illustrant de manière épouvantable le cynisme et l'absence totale d'empathie de ce jeune et brillant indien, patron d'un gigantesque chantier de démantèlement de navires, embauchant de jeunes familles tamoules dans la misère et les tuant au travail, les exposant aux produits et vapeurs toxiques le temps que la chimie les rende malades et puis les tue, jeunes papas et mamans avec leurs enfants : "tu ne peux pas les chasser dès qu'il y en a un qui va mal, tu risques que personne ne veuille plus travailler pour toi". Je recommande la consultation des dernières pages du recueil de photographies "Oil" du canadien Burtynsky, pour ceux qui voudraient mettre des images sur cette horreur.

Ce Carlotto restera donc comme une déception, après les 2 brillants précédents opus.
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