Livre après livre, Cambourakis poursuit son travail de republication de l'intégrale de
Don Carpenter avec
Un rêve lointain – toujours traduit par
Céline Leroy -, dernier roman fini de son vivant.
Ce qui est bien avec Donnie, c'est qu'il ne lui faut que quelques pages pour te réinstaller dans ses atmosphères que j'affectionne : Frisco et sa banlieue, des bars et commerces envahis par la chaleur humaine, des fêtes qui tentent de masquer les solitudes de leurs protagonistes.
Le décor en place, les acteurs peuvent entrer en scène. Ici Jackie Jeminovski dont le passé flamboyant (job d'hôtesse de l'air, famille nombreuse, maison accueillante) est désormais derrière elle. Seule, indécise, alcoolique.
Ça ne va pas mieux pour son fils Derek qui se cherche depuis longtemps, entre zonages et fréquentations louches, espoir d'un rebond possible grâce à l'argent que son père n'est pourtant pas prêt de lui lâcher et passivité agaçante face à une réalité sociétale qu'il ne comprend pas.
« Elle en avait assez vu pour savoir quel genre d'hommes réussissait et Derek n'était pas l'un d'eux. Il était déphasé, voilà tout. Pas assez pour être un rebelle mais assez pour être toujours à côté de la plaque. »
Ces deux-là végètent donc, sous l'oeil de Kittie Brown la serveuse du Buttermilk Corner, pas vraiment mieux lotie par la vie mais qui s'accroche et accompagne de son humanité ce microcosme qui se cherche.
On retrouve dans
Un rêve lointain cette habileté de Carpenter à nous faire immédiatement entrer en empathie avec ses personnages paumés, qui luttent encore pour trouver leur place, pour leur avenir ou seulement les quelques années qu'il leur reste.
Comme d'hab', c'est stylé, cosy et nostalgique à souhait, avec en prime un petit clin d'oeil au Bar
Sans Nom.