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Critique de PhilippeCastellain


La guerre s'enlisant, le général Alexander a une idée : déclencher une révolte d'esclaves pour affaiblir le Sud. Parmi les engagés volontaires noirs utilisés comme hommes à tout faire, on en prend un au pif, de toute façon on les appelle tous Black Face. Devinez qui est choisi pour le cornaquer derrière les lignes sudistes ! Mais bientôt, la révolte devient incontrôlable...

L'un des meilleurs albums des Tuniques Bleues, et peut-être le plus intéressant. La série en elle-même est très bonne, avec son refus du manichéisme et sa critique des nordistes. Ses principaux défauts sont d'ailleurs d'insister un peu trop sur ces points-là, en allant jusqu'au cynisme et en exagérant un peu les talents de stratèges De Lee – grands certes, mais surtout en comparaison de l'incompétence des Pope, McClellan et autre Burnside qui lui étaient opposés.

Si les autres opus sont globalement centrés sur l'antimilitarisme, celui-ci est le seul à aborder de front la question de l'esclavage dans les causes et le déroulé de la guerre de Sécession. Un problème lourd, épineux, complexe, et à peu près unanimement évité par tous les médias, en dehors d'une poignée d'universitaires. Comme s'en doutent les auteurs, ce n'est pas par pure bonté d'âme que l'esclavage a été aboli. Contrairement à ce que dit l'un des adjoints du général Alexander, les causes en étaient bien plus compliquées que le simple désir des politiciens du Nord de récupérer les plantations du Sud. Mais les raisons économiques, notamment liées à l'industrialisation, étaient bel et bien centrales.

Deux modèles économiques s'affrontaient, le nord ayant remplacé la main d'oeuvre servile par la mécanisation comme force de travail de base : de « élément du capital » les Noirs devenaient « ouvriers au service du capital », deux statuts aux conditions de vie relativement comparables, mais aux implications antagonistes. C'est pourquoi le recours à l'esclavage représentait un frein à l'industrialisation et à l'expansion technologique du Nord ; et pourquoi il n'était pas question de doubler l'abolitionnisme par l'égalitarisme. Black Face, intelligent, l'a parfaitement compris.

Par ailleurs, c'est l'un des albums les plus durs. Les méthodes du général, jamais très reluisantes, sont là particulièrement immondes. Les révoltés noirs, de leur côté, sont montrés comme sans pitié pour les civiles. Comme toujours, il n'y a pas d'angélisme. Mais contrairement à la plupart des autres albums, il n'y a pratiquement pas d'élément comique ou de « moment de grâce » pour adoucir le propos.

Sauf à la fin quand Stilman, dans un soudain acte d'autorité, ordonne de les gracier. Une subite mise en profondeur du personnage, qui curieusement se met de plus en plus à incarner l'esprit de la série.
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