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Critique de CDemassieux


« La vie est une grande désillusion », écrivait Oscar Wilde.
Après la lecture du livre de Christine Chamard, Puy du Fou – la grande trahison, je le confirme. La désillusion s'appelle ici Philippe de Villiers, dont je découvre de jour en jour que le contenu n'est décidément pas conforme à l'emballage.
S'agissant du Puy du Fou, parc effectivement salué dans le monde entier pour ses indéniables qualités, l'auteur sait de quoi elle parle, elle qui fut une Puyfolaise – nom pour désigner les bénévoles du Puy du Fou et sans lesquels ce dernier n'aurait jamais pu voir le jour – enthousiaste, ainsi que son mari, tous deux quittant, enfants sous le bras, la Région parisienne pour s'installer en Vendée.
Pour autant, face aux multiples trahisons du clan De Villiers, Christine Chamard – journaliste de formation – ne cède pas à la tentation de la vengeance mais, en tirant le fil du temps – comme Philippe de Villiers, non sans un certain cynisme, tire sur celui du mensonge, dit-il ! –, elle expose au lecteur ce que l'on peut appeler un formidable gâchis. Comme l'a écrit, à propos de tout autre chose, le frère de l'intéressé – le général Pierre de Villiers –, « méfiez-vous de la confiance aveugle ». Beaucoup de Puyfolais ne se sont pas assez méfiés et l'ont payé au prix fort.
Il en a cependant fallu du courage à l'auteur pour défier le clan De Villiers, qui ne recule devant rien pour écarter les gêneurs. Mais il faut croire que Christine Chamard gêne terriblement ce clan depuis la parution de son livre. Ainsi, apprenant qu'elle était invitée sur le plateau de l'émission de Laurent Ruquier, On n'est pas couché, Philippe de Villiers en personne, qui avait jusque-là systématiquement refusé les invitations du présentateur, s'est offert de se substituer à elle. Ruquier, qui voyait sans doute là une occasion de se payer la tête du vicomte, a refusé.
De l'aveu même de Christine Chamard – ayant eu l'occasion de m'entretenir avec elle –, la promotion de son livre n'est pas aisée. Bravo aux médias qui n'ont de cesse de vendre leur indépendance et se couchent au moindre coup de vent !
Il faut admettre que le contenu du livre déboulonne joliment la statue du commandeur. Entre son appropriation éhontée d'une aventure collective désintéressée, grâce à d'ingénieux montages dépossédant les Puyfolais ; sa tyrannie ordinaire – congédiant tel ou tel selon son humeur de seigneur féodal et au mépris des services rendus – ; son obsession de la réussite de son ancien bras droit, le sénateur Bruno Retailleau, auquel il voue une haine inextinguible – sa « plaie narcissique », écrit l'auteur –, on est bien loin de l'image de sage au-dessus de la mêlée que tente de véhiculer Philippe de Villiers.
Que dire aussi de cette mégalomanie lui faisant affirmer qu'il a été intime avec toutes les personnalités croisées dans sa vie politique ? Là aussi, Christine Chamard déconstruit le mythe en démontrant l'exagération de Philippe de Villiers, lequel s'invente souvent des gloires fictives. Il va même jusqu'à réveiller un mort illustre qui lui aurait écrit une lettre lue en public. Il s'agit de Charette, fameux chef vendéen – surnommé le Roi de la Vendée –, fusillé le 26 mars 1796 à Nantes…! Son identification à Charette tourne, elle aussi, à l'obsession.
Et comme Philippe de Villiers semble prendre ses désirs pour des réalités, il entre dans des fureurs atroces dès que ladite réalité le contredit. Mais il n'est qu'homme et il doit parfois céder, tel ce jour où il sait que la présidence du conseil général de la Vendée est perdue.
Pour être dans la lumière – car il déteste l'ombre, sauf quand elle plonge ses subalternes dans le noir –, Philippe de Villiers n'hésite pas non plus à contredire ses convictions, en s'affichant par exemple au Puy du Fou avec celui qui n'est alors que ministre de l'Économie mais brigue déjà en secret la fonction suprême, je veux parler d'Emmanuel Macron, symbole d'une mondialisation honnie par le vicomte. Avec lui, Philippe de Villiers s'invente aussi une amitié – se vantant même de son influence sur lui. Amitié cependant contredite par l'entourage du désormais président. Qu'importe la vérité et la versatilité pourvu que le « Créateur » – ainsi qu'on l'appelle au Puy du Fou – brille ; ce qu'il adore par-dessus tout.
Certes, Philippe de Villiers a du talent, nul ne lui contestera, à commencer par Christine Chamard, mais le talent n'autorise pas tout. Quand on se réclame de figures illustres du roman national comme Jeanne d'Arc, il faut tenir son rang !
Il faut aussi ne pas exagérer ses mérites : oui, Philippe de Villiers a beaucoup apporté à la Vendée mais, non, elle ne lui doit pas tout. Depuis longtemps, ce coin de France, meurtri par un génocide dont on lui refuse toujours d'être officiellement reconnu, s'est retroussé les manches, conscient de n'avoir rien à attendre de personne, ainsi que me le confiaient récemment deux éminents historiens : Reynald Secher et Michel Chamard, ce dernier époux de l'auteur du présent livre.
Le témoignage de Christine Chamard – très documenté et qu'on ne saurait accuser d'extrapolation, voire de divagation – me laisse donc la détestable impression d'avoir été dupé par un homme dont je n'ignorais pas certains travers mais dont j'étais loin de me douter qu'il pouvait descendre aussi bas dans les abysses de la nature humaine. Sacrifier une aventure collective d'exception – le Puy du Fou – à ses seuls intérêts privés et exalter ensuite les valeurs chrétiennes, c'est un peu fort !
Je plains sincèrement les victimes puyfolaises de cette tromperie et je suis ravi pour eux qu'une Christine Chamard leur ait donné la parole et se soit dressée pour sonner la fin de la récréation. Un autre parc a jadis vu le jour grâce à la volonté d'un homme, mort il y a dix ans, René Monory : le Futuroscope. Là-bas, on n'y invoque par artificiellement le « souffle de Dieu » pour se distinguer – après que Philippe de Villiers l'a autrefois renié dans un entretien accordé au Point ! –, pas plus qu'on alimente le culte de la personnalité. Au fait, Dieu est PARTOUT chez Lui !
Enfin, avant de faire le vide autour de sa personne, Philippe de Villiers aurait été bien inspiré de méditer cette phrase De Balzac : « Il faut aimer ses amis comme on aime ses enfants, pour eux et non pour soi. le moi cause les malheurs et les chagrins. »

(Je remercie les éditions Max Milo pour le présent ouvrage, ainsi que son auteur, Christine Chamard, que je salue ici sincèrement)

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