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Critique de Kirzy


Rentrée littéraire 2021 #9

Sans doute le roman le plus éblouissant lu depuis très longtemps !

Lorsque le dernier arbre s'ouvre comme un roman dystopique. 2038, le monde est presque entièrement dépourvu d'arbres après un Armageddon écologique surnommé le « Grand Dépérissement ». L'absence de couverture forestière a engendré des nuages de poussières déplaçant des réfugiés climatiques souffrant de « la craqueuse », un maladie mortelle. le Canada apparait comme un Eldorado, encore riche en forêts primaires et en eau, avec un complexe exclusif sur une île la Cathédrale, où des pèlerins ultra riches viennent se ressourcer au contact des derniers séquoias. C'est là que travaille comme guide la dendrologue Jacinda Greenwood. Et voilà qu'un ex-petit ami avocat vient lui révéler que cette île lui appartiendrait.

Ces seuls premiers chapitres suffiraient à embarquer la plupart des lecteurs. Mais Michael Christie surprend par une maestria narrative qui passe du futur au passé pour raconter la saga des Greenwood et le lien durable qu'ils ont avec l'île. le récit se fait dendrologique, réinventant la notion d'arbre généalogique en propulsant les membres de cette famille dans une construction propulsive brillante. La structure du récit adopte celle des cernes de croissance d'un arbre, les cernes les plus récents étant à l'extérieur. Ainsi le roman remonte le temps ( 2038 – 2008 – 1974 – 1934 ) jusqu'au coeur du noyau familial des Greenwood, sa germination ( 1908 ) puis repart chronologiquement jusqu'en 2038. Jusqu'au vertige tant les rebondissements, surprises et épiphanies s'enchaînent tout le long. Amour, trahison, sacrifice, vengeance, transmission, chaque période confronte ses personnages à des choix moraux qui auront des conséquences, tant personnelles qu'environnementales.

La section la plus exaltante est sans doute celle de 1934. Avec ses accents steinbeckiens, on suit le grand-oncle de Jacinda avec un bébé qui ne lui appartient pas et un cahier révélant les secrets de ses origines. L'énergique course-poursuite en pleine Grande dépression parmi les vagabonds fuyant la misère est inoubliable, sentiment renforcé par l'opposition biblique entre les deux frères ( le grand-oncle de Jacinda et son grand-père ).

Le roman est sombre, avec son analogie famille / arbre qui décrit une humanité avide pillant et détruisant la planète, vouée à la disparition, face à une lignée en voie de décomposition. Jacinda s'était habituée à vivre sans famille, sans histoire à raconter, sans souvenir ni héritage à transmettre, sans ancrage, juste «  une graine entraînée par le courant ». A la fin du récit, elle commence à comprendre combien il peut être bon « de se sentir des racines ». Une recomposition semble possible.

Ce ( premier !!!!! ) roman symphonique est d'une richesse exceptionnelle, rassemblant l'intime et le vaste, le monde humain et le naturel, le passé et le futur, tout en suggérant que de telles distinctions n'existent pas vraiment. La trouble symbiose de l'être humain avec la nature touche au sublime. du souffle, du coeur, du fond, le plaisir de lecture est total.

Exceptionnel !
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