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Critique de Darkcook


Un très beau Poirot, davantage une magnifique histoire d'amour tragique qu'une enquête policière. Je dis cela parce que (comme d'habitude) j'avais vu l'adaptation récente avec David Suchet, en avais adoré la diabolique intrigue, mais elle n'est rien sans le triangle Simon/Jacqueline/Linnet, et surtout Jacqueline, enflammée comme un personnage de drame romantique ou de tragédie élizabethaine. Agatha Christie leur offre, à elle et à Simon, une fin digne de ce nom.

On retrouve dans Mort sur le Nil toutes les qualités d'Agatha Christie : une énigme machiavélique, une écriture aussi simple qu'efficace, une sagesse shakespearienne, de l'humour grâce à certains personnages secondaires, avec en plus un petit récit de voyage inspiré de la propre vie de l'auteur, retardant le crime de près de 120 pages. Ce Poirot-ci fait une cinquantaine de pages de plus que la moyenne, mais ce n'est rien : l'instant du crime est décalé pour nous présenter comme il se doit les protagonistes et nous faire visiter l'Égypte. On sent la catastrophe arriver, comme Poirot, l'atmosphère est étouffante, comme si le climat et la tension nous envahissaient.

Le nombre assez élevé (peut-être légèrement plus que d'habitude) de suspects et de personnages secondaires permet à Agatha Christie d'embarquer sur sa croisière toutes les facettes de l'époque, les courants de pensée, les caractères, pouvant ainsi équilibrer la plus grande noirceur avec le grotesque, les plus grandes fortunes et esprits matériels avec un anarchiste/communiste/contestataire/révolutionnaire par excellence (particulièrement caricatural et au final, il est le personnage le plus drôle du roman après avoir été insupportable dans ses extrémités). Tous ces seconds rôles ont leur part de cadavres et de secrets personnels, et beaucoup sont très attachants, on pensera surtout à Rosalie Otterbourne, qui donne une énième occasion à Poirot de jouer les marieurs.

Et si le tour de passe-passe du meurtre initial tient du génie, comme le dit lui-même notre ami belge, c'est, après cette fabuleuse équation, Jacqueline de Bellefort et son amour qui resteront dans nos coeurs. Elle me rappelle pourquoi j'aime la littérature, berceau d'amours tellement intenses, comme la civilisation actuelle, mangée par la crise, le stress, l'individualisme urbain, la fatuité technologique, embourbée dans un marasme tel que Céline en avait prédit, n'en connait plus.

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