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Critique de murmur


murmur
08 septembre 2013
Dans l'univers confiné de la bonne société génévoise au sein de la société des nations se noue une histoire d'amour absolu entre le haut dignitaire Solal : "le seigneur" et Ariane l'épouse d'un fonctionnaire cadre A en quelque sorte sous-fifre de son rival. le roman fleuve raconte les évolutions de cet amour : sa naissance miraculeuse et parfaite, ses balbutiements, son envol, ses affadissements, ses réveils, sa décadence et sa mort. Cet amour est façonné par les protagonistes à la manière d'une oeuvre d'art, rien de vulgaire ne doit l'entacher car l'état de nature est un concept hitlérien et c'est là la problématique du roman : comment vivre une passion en échappant à la bestialité alors qu'il révèle lui même de la bestialité de l'homme?
L'amour comme une religion est peut être la solution...

Alors que l'on entame une lecture qui va être difficile par la minutie avec laquelle la psychologie des personnages et des sociétés est traitée : la vie solitaire et ennuyeuse d'Ariane, les calculs ridicules de son mari pour grimper dans la société, la mesquinerie de sa belle mère. Tout ça est long, on pourrait décrocher et s'ennuyer mais l'ironie et la caricature m'ont détendue de ses longs passages où il ne se passe encore rien. Puis vient l'attaque du seigneur avec la leçon de séduction qui ne peut laisser aucune femme indifférente : je conseille ce passage aux jeunes filles!
Albert Cohen a une écriture magnifique, je lis à haute voix et je me laisse bercer par ces phrases qui sont des sortes de versets, sans ponctuation ou avec trop de points. L'oralisation donne du sens au texte, sans cela il m'arrive de décrocher. J'adore la façon dont il personnalise les discours des différents personnages part des accents, des tics, des défauts... Cela rend le texte vivant et comme on change souvent de narrateur ça rythme le récit.
j'ai apprécié la complexité des personnages qui ont une forme de démence, autodestructeurs surtout Solal qui passe de la cruauté à la tendresse et dont on sent contuellement les hésitations.
Cet amour se construit comme on bâtit un ghetto et on plonge dans l'histoire juive puisqu'il est contemporain à l'arrivée au pouvoir de Hitler. J'ai ressenti au fond une sorte de culpabilité avec cette histoire d'adultère; une relation entre cet isolement du couple et celle du peuple juif, entre l'amour pour Solal et l'amour pour Dieu.
Le passage où est opposée la philosophie nazie sur l'état de nature contre la philosophie juive sur l'état de culture est fabuleux.
En somme, cette histoire d'amour est cruelle et belle mais il n'y a pas d'amour heureux....
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