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Critique de AnneVacquant


Livre reçu dans le cadre de l'opération « Masse Critique » de Babelio.
Le petit format de la collection « La petite jaune » m'a surprise tout d'abord. Puis, je l'ai trouvé maniable. Il « adoucit » en quelque sorte le côté « classique » de l'essai, et bien que le style de l'auteur ne soit en rien rébarbatif.

Jean-Louis Comolli, auteur, réalisateur de films et de films documentaires se voit refuser son dernier film sur Nicolas Philibert – auquel il rend hommage tout au long de cet essai – au festival Cinéma du réel. Suite à cela, il développe une réflexion qui s'inscrit dans le cadre d'une explication, et d'une interrogation sur le devenir du film documentaire. En effet, le propos et la pensée de l'auteur embrasse les réalités économiques, idéologiques et politiques actuelles, s'appliquant non seulement au cinéma et au cinéma documentaire mais également au théâtre, à l'art et à la littérature.

Une fois encore – et bien que ma lecture du livre "Critique et université" de David Vasse m'ait beaucoup appris –, je ne me pose pas en experte du cinéma et du cinéma documentaire qui plus est. Je suis une lectrice et une spectatrice qui aime approfondir le documentaire, le film ou le texte qu'on lui propose, en amatrice éclairée si possible. L'essai de J-L. Comolli qui, s'il n'utilise pas l'écriture inclusive nouvellement proposée, prend soin à chaque fois, d'inclure le féminin tel qu'il est possible de le pratiquer dans la langue, française notamment. Personnellement concernée et interpellée, j'écoute « la défense » du film, de et par Jean-Louis Comolli.

Après une "préface", le texte s'articule autour de quinze « entrées » émaillées d'exemples, sans introduction ni conclusion à proprement parler, comme si précisément, il s'agissait de parler et non de discourir. Un peu comme l'auteur a monté son film d'ailleurs. Il rappelle que le credo du film documentaire est une « mise en abyme » (p 14) de l'autre par écran interposés et que pour ce faire, il convient de respecter celui ou celle qui est filmé et celle ou celui qui le regarde ensuite. La société actuelle désirant toujours plus de nouveautés, réclame des miracles « hebdomadaires » (p37), un « plus-de-jouir » (p 71) et du spectaculaire à s'en gorger quitte à s'en dégouter. Les superlatifs, clichés, voire tics de langage s'imposent couramment (p 27), martèlent l'esprit et réduisent les capacités du libre-arbitre. Parce que le confinement imposé parachève « une sorte de victoire du virtuel sur le réel » (p 13), J-L. Comolli ausculte le passage du grand écran au petit écran (p 20), les rapports de force entre les éléments en place, la critique spécialisée et la « démocratie directe » (p 70) du Net. Il déplore la mainmise du capital, la rentabilité et la culture de masse qui font loi de nos jours (p 61).

Opposant le passé et sa répétition utile au présent du direct et de la nouveauté sans cesse renouvelée, l'auteur réclame un retour au respect. Face au mépris généralisé, il préconise de revenir à une éthique digne du cinéaste du réel, face au corps filmé, mais aussi face aux spectateurs et spectatrices. Dire « non » (p 73) au diktat des puissants pour recouvrer la liberté d'inventer (p 57) et préserver le « rêve d'un monde meilleur » (p 56).
En dépit de la tendance prédominante au cinéma d'action, J-L. Comolli « manifeste pour un cinéma de paroles » (p 78), exigeant mais fertile, riche de ce qui est dit et de ce qui est sous-entendu, pour "un secret" (p 81) que l'auteur m'a donné envie de partager.
anne.vacquant.free.fr/av/
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