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Critique de Bellonzo


le diable m'a titillé de retourner au Sud profond des bluesmen originels, me pencher une fois encore sur la légende Robert Johnson. Et d'y perdre un peu de temps étant donné que le blues ça s'écoute plus que ça ne se lit. Bien fait pour moi. Damn I did'nt need being on the road again. Les auteurs de cette biographie ont compulsé une fameuse documentation. Ces historiens de la musique américaine ont exploité des registres municipaux peu fiables, écouté depuis 40 ans des vétérans de la scène blues du Mississippi de ces années trente, vérifié de multiples sources, ce qui nous vaut de très nombreux fac-similés sans intérêt, et pas mal de photos dont la qualité d'impression est certes médiocre.

Après cette petite méchanceté sur ce livre je veux dire que, bien qu'alourdi de tous ces documents, et débordant de noms de musiciens, villes, lieux-dits, salles de concert, terme bien pompeux pour désigner les jukes, mal famés au whisky frelaté et aux bagarres quotidiennes, Et le diable a surgi. La vraie vie de Robert Johnson.reste un compte rendu intéressant de la vie dans le Sud de ces innombrables guitaristes, harmonicistes (les deux instruments roi du South Blues) traîne-misère, jouant dans la poussière des rues pour quelques nickels, chantant les complaintes la plupart du temps hypersexistes, à grands coups de doubles sens, tant la solitude leur était prégnante. Pour l'élégance du vocabulaire le delta de l'Old Man River n'est pas l'idéal. Une femme y est souvent nommée "my rider", et Robert Johnson n'avait rien d'un romantique se consumant pour une belle. I'm gonna beat my woman until I get satisfied, extrait de Me and the devil blues. On sait que tout cela finira bien mal pour Robert.

du coup c'est le trop-plein d'informations. Bref le livre tient parfois du manuel scolaire indigeste. Mais il a la bonne idée d'insister, en dehors des femmes, du whisky (le moonshine, il y a plein de mots d'argot pour ça aussi), des accordages un peu vicieux sur le manche de l'instrument (sachez que personnellement je ne m'y frotte pas), des querelles et des tabassages ordinaires, sur la grande influence afro-caribéenne, le vaudou, hoodoo, ce culte si bien entretenu par la population noire du Sud. Bourré de magie noire et de symboles sexuels, le blues encore très rural de ce Sud américain n'est pas à mettre entre toutes les oreilles.

Mais tout ça, on l'a compris en une soixantaine de pages. Surtout si l'on a lu le superbe album Love in vain de Mezzo et J.M.Dupont qui en dit autant avec bien plus de plaisir B.D.Blues que je vous invite à (re)découvrir. Enfin et surtout il faut écouter les rares enregistrements du maître qui rencontra le diable à un carrefour par une nuit noire ou étoilée, ça dépend des versions, pour échanger le pacte faustien bien connu. Autre chose bien connue, ici bas quand la légende est belle, on imprime la légende. Voici Terraplane Blues, très riche en métaphores mécaniques à base d'huile et de pistons. "Mother if you read, forgive your son. He met the devil".

Bruce Conforth, fondateur du Rock'n'Roll Hall of Fame, spécialiste de ce qu'il est convenu d'appeler la culture populaire américaine, et Gayle Dean Wardlow, historien du blues et collectionneur, sont les auteurs de Et le diable a surgi. Leur travail a été considérable. Je n'ai pas été tellement tendre avec leur ouvrage. Mais, surely, they've got the blues. 🎸
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