AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de memma


memma
05 novembre 2016
Le roman relate les circonstances dans lesquelles l'Ouest du pays fictif du Costaguana se déclare indépendant, en particulier grâce à la richesse que lui procure l'exploitation de sa mine d'argent. L'histoire est sans doute inspirée par l'indépendance de Panama de la Colombie qui a eu lieu en 1903, un an avant la parution du livre.

La situation politique décrite est complexe pour qui (comme moi) a du mal à dominer les troubles de l'Amérique du Sud à la fin du XIXe siècle. En gros, l'Ouest du Costaguana est gouverné par des notables encore très européens et par ailleurs prêts à pactiser avec les Etats-Unis (la mine d'argent, par exemple est possédée par un anglais et financée par un banquier américain). En opposition, le gouvernement, installé à l'Est de l'autre côté des montagnes, a été pris d'assaut par une des révolutions populaires présentées comme permanentes dans la région. Cette situation est typique de l'endroit et de l'époque et elle est décrite de façon très rigoureuse.

Bizarrement, Conrad, d'ordinaire peu favorable au colonialisme, envisage ici la révolution et les mouvements populistes qu'elle génère jusqu'à l'Ouest de façon très négative. C'est peut-être que la véritable révolte - chez Conrad - est individuelle et c'est celle de l'aventurier. Le personnage de Nostromo, initialement complètement inféodé aux puissances en place (il est "notre homme", l'homme des gens), décide de voler et de cacher l'argent qu'on lui confie. Cette décision le projette dans une marginalité rêveuse qui est de l'ordre de l'aventure. Il devient quelqu'un ; il s'appartient enfin.

C'est un roman horriblement difficile à comprendre, à cause des variations temporelles permanentes : je m'y suis acharnée. Le mieux est peut-être cependant de s'y laisser glisser. Déconnectées de la trame narrative, des scènes deviennent alors particulièrement visibles, d'autant qu'elles sont répétées au gré du roman : entre tant d'autres, l'arrivée - symbolique - du Président démis chevauchant un âne, le réveil de Nostromo renaissant sur la plage, et surtout l'extraordinaire fin où le véritable nom de Nostromo est crié vers la mer, acquérant ainsi enfin la dimension héroïque recherchée. C'est une des plus belles fins de roman que j'aie pu lire.
Commenter  J’apprécie          75



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}