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Critique de Christw


On se laisse facilement happer par cette histoire presque incroyable, cet exil dans une colonie africaine d'un jeune type sans grandes compétences qui se voit promettre du « Monsieur le Directeur » dans une succursale où on produit des bananes. le pauvre Victor, avec la bénédiction crédule d'une grand-mère surprotectrice et très vite soustrait à leurs illusions, y trouve la bassesse fiévreuse et les couleurs extravagantes d'un univers qui laisse peu de place aux vertus civilisatrices de la colonisation.

Le livre refermé, les questions arrivent : d'où Paule Constant, qu'on n'avait jamais lue, dont on sait peu sinon qu'elle est de l'Académie Goncourt, d'où cette écrivaine tient-elle cette férocité amère ? La réponse peut venir de la quatrième de couverture de "Mes Afriques" (Quarto Gallimard) : "chaque roman dessine sa géographie dans des Afriques sans cesse réinventées. [...]. de la douleur enfouie est né un monde que Paule Constant continue d'explorer." Car Paule Constant a connu une enfance brinquebalée à travers le monde, où la violence et la douleur étaient présentes.

La pénibilité du travail des indigènes dans la bananeraie, la lumière bleutée électrique permanente et les insecticides balancés par avion, les odeurs de pourri, la maquerelle Ysée et son manuel Miss Priddy pour des putains propres et blondes, Lola qui rêve de peau claire, le faux prêcheur aux mains sales, et Allez Louya, le baptême d'un chimpanzé, d'où viendrait toute cette virulence, sinon d'un passé dont elle est rescapée ? Comment penser le jeu cruel de la chaude-souris, si elle n'y a pas assisté douloureusement un jour ?

Et le white spirit : ironie, pas l'essence, mais joli vocable choisi par les vendeurs de "La Ressource de l'Africain" pour vanter les vertus blanchissantes d'un poison en poudre. Et frère Emmanuel, prédicateur de pacotille, les emmène tous au paradis, produit blancheur, esprit pur, jusqu'à l'absorption et la mort collective.

Et au bout, un happy end quand même, en clin d'oeil, mais qui ne rassure pas vraiment.

Paule Constant, c'est une plume, très alerte, on ne s'ennuie pas une seconde dans ce roman éclatant.

Lien : https://christianwery.blogsp..
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