La Belle au bois dormant

Jusqu'au jour où une vieille paysanne, courbée sous le poids des ans, lui conta la légende de la Belle au Bois Dormant. Elle lui parla de la princesse, belle comme le jour, et du sort jeté sur le château endormi.
Mais elle lui parla aussi des ronces qui avaient causé la perte de tous les princes ayant tenté de les franchir. Le prince cependant était bien décidé : il irait jusqu'à la tour. Son cœur vaillant ne pouvait supporter la pensée de la Belle, prisonnière en son Bois Dormant.

"Les années passèrent et la princesse grandit en sagesse, en beauté et en vertu, si bien que tous ceux qui l'approchaient ne pouvaient s'empêcher de l'aimer."

Elle était toujours en vie, ses joues qui avaient gardé la fraîcheur des roses, et le souffle qui soulevait doucement sa poitrine, l'attestaient ; mais ses yeux restaient irrémédiablement fermés.

La reine se baignait parfois dans un lieu retiré où vivait une très vieille grenouille, et elle chantait pour elle comme elle l'aurait fait pour son propre enfant.
Un jour, à sa grande surprise, la grenouille sauta hors de l'eau et lui dit : "Un si beau chant mérite une autre oreille que la mienne. Avant qu'un an ne s'écoule, il te naître une fille."

Et la légende de la Belle au Bois Dormant se répandit de par tout le pays. En ayant entendu parler, de jeunes princes çà et là se risquèrent à franchir la barrière de ronce qui encerclait le château.
Mais aucun d'eux ne reparut jamais.

Aussitôt le château tout entier fut plongé dans un profond sommeil. Un silence de mort s'installa. Les chevaux s'endormirent à l'écurie, les pigeons sur le toit, les libellules dans les douves. Dans la cheminée, le feu s'éteignit; le cuisinier lâcha le petit mitron qu'il avait saisi par l'oreille pour le punir, et tous deux s'assoupirent. Le vent tomba, et plus rien ne bougea, pas même la plus fine toile d'araignée.