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Critique de Noiredencre


«Quelle tristesse que Dieu ait donné une telle oreille à une femme», p 167

Un superbe portrait de femme avant tout,
une ode à la musique argentine et au tango aussi,
un roman sur l'immigration en Argentine au début du XXe siècle... à travers la vie de la jeune Leda qui quitte son Italie natale pleine d'espoir pour sa vie à venir.

En 1913 la condition de la femme est très limité: soumise à son père ou à son mari, juste bonne à nourrir les siens, faire le ménage et coudre les vêtements. Elle n'a même pas le droit d'apprendre à jouer d'un instrument de musique; ce serait une pure perte de temps puisqu'elle doit tout son temps à tenir la maison. La jeune Leda a pourtant très envie de jouer du violon comme son père et son grand-père. Elle s'entraîne en cachette.
A cette époque, de nombreux jeunes fuient la misère et espèrent gagner un monde nouveau et se construire leur vie rêvée en embarquant pour les Amériques. Un cousin de Leda, Dante, part en Argentine. Ils se font la promesse de s'y retrouver et se fiancent. Ils fuient tous les deux un passé lourd et un fardeau difficile à porter. Hélas lorsque Leda débarque enfin sur le sol argentin, Dante n'est plus. Seule, veuve, sans véritable ressource, elle va devoir composer avec la vie, tricher, mentir, se cacher pour s'en sortir. C'est le tango qui va lui permettre de se trouver, la musique qui va la sauver.
Peu à peu, à travers le parcours semé d'embûches de Leda, le lecteur entre en contact avec le monde de la nuit argentine rythmé par le tango qui se développe progressivement, se modifie, emporte les foules et entremêle parfois les passions.

Ce roman apparaît comme une véritable fresque historique à la découverte de Buenos Aires au début du XXe siècle. La vie des immigrés de différentes provenances, leurs conditions de travail et de survie, les épidémies qui déplacent les populations d'origines et permettent aux nouvelles de s'installer dans les quartiers de la Boca ou San Telmo, la progression du tango jusqu'à son apogée, alors que l'Europe entre en guerre et se déchire. C'est une époque de ruptures, de changements irréversibles, de tourmente.
La plume de Carolina de Robertis sait admirablement rendre ces sentiments multiples, divers, parfois opposés. Ce monde en profonde mutation qui souffre, se passionne, séduit, détruit aussi mais qui est la condition de milliers d'êtres qui ne demandent qu'à vivre.

Un roman à l'écriture fine et précise, au rythme bien structuré dans des parties distinctes, emprunt d'une grande sensualité, de générosité, de respect et de tolérance. Puisse-t-il contribuer à ouvrir un peu plus grand certains esprits...

Merci aux éditions du Cherche-Midi pour ce cadeau et à Babelio de m'avoir invitée à cette Masse Critique spéciale! Je suis heureuse de cette découverte.
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