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Critique de Aelyse


Je suis une quiche en histoire de l'art.

Il y aurait sans doute des tas de manières élégantes de commencer ce billet, mais celle-là me paraît pertinente: je n'y connais vraiment pas grand-chose. Mais, comme je ne cesse de le répéter, je suis aussi très curieuse. C'est pour ça que "Saturne" faisait partie de ma sélection lors du dernier Masse Critique organisé par Babelio. Et j'aurais clairement pu tomber plus mal!

Au départ, quand on me disait "Goya", je répondais "Les ménines", c'est dire si j'étais loin du compte (en fait, c'est Velazquez). Je serai donc bien incapable de vous parler du respect de l'artiste ou de débattre de la thèse présentée.

Est-ce parce que je ne connais rien à Goya et à sa vie que j'ai ressenti le résumé de l'éditeur comme un gros spoiler dans ma face? "amant insatiable (il aime les femmes et, en secret, un homme)" Damned. La partie "il aime un homme" m'aurait prise par surprise, abasourdie, et j'aurais pu davantage imaginer le choc de son fils en le découvrant, si je ne l'avais pas lu dès le départ. Bouh. Ce n'est pas bien de me gâcher un rebondissement de fou (oui, peut-être que tout le monde le sait - mais moi, je ne savais pas!).

Ceci mis à part, j'ai été fascinée par ce roman. La pluralité des voix fonctionne très bien, et on découvre les mêmes événements racontés selon différents points de vue. Quelle belle manière d'enrichir encore la complexité des relations entre le père et le fils! Entre malentendus et maladresses, haine et pitié, se tisse la trame d'une déception mutuelle, inexorable.

Etre Javier Goya, c'est vivre écrasé par l'ombre d'un père immense, un génie colossal qui ne laisse aucune place autour de lui. Je me suis beaucoup attachée à ce personnage. Comment s'épanouir, que devenir, qui être, quand on ne vous a autorisé que la peinture comme voie, condamné à être dominé par le talent établi qui vous a précédé? Il le déteste, mais ne peut s'empêcher de chercher son approbation, en encaissant très mal chaque remarque acerbe. Javier devait devenir "Goya ou rien"... il a préféré le rien. Impossible de le lui reprocher. Il évite l'affrontement, et se met en sommeil... pour un temps.

Le récit de cette relation constitue à mes yeux la plus grande réussite de ce roman. Parfaitement dépeinte et très crédible, elle m'a complètement prise aux tripes: j'ai été autant touchée par la détresse de Javier que par la déception de Francisco. L'auteur parvient à nous faire ressentir de l'empathie pour chacun de ses personnages, malgré leurs nombreux côtés détestables (l'arrogance de Francisco, la lâcheté de Javier, la superficialité de Mariano).

Mais évidemment, il y a la peinture... Je regrette bien sûr l'impression des tableaux en noir et blanc (peut-être pour une prochaine édition deluxe collector spéciale fans?) mais on trouve facilement les tableaux en couleurs sur internet. Si on ne les connaît pas déjà, d'accord. On va arrêter d'appuyer sur mon manque de culture, maintenant!

Enchâssées dans le récit, on trouve donc les photos des quatorze "Pinturas Negras", accompagnée d'une description éblouissante. Au départ apparemment détachées de l'intrigue (pour ne pas dire qu'on a l'impression que ça tombe comme un cheveu dans la soupe), un lien se tisse peu à peu, de plus en plus évident, jusqu'au final. Quand je dis "explications", je ne veux pas dire "termes techniques bien prises de tête", loin de là: nous ne sommes pas dans l'analyse, mais dans l'émotionnel. On nous décrit ce que peuvent ressentir les personnages représentés, ce qu'il s'y passe... On anime la scène devant nos yeux. J'ai adoré ça.

Alors certes, il est parfois un peu long, le vocabulaire peut paraître un brin trop relevé et freiner la lecture... Mais quelle belle découverte! Disons que ce n'est pas le livre dont on lira dix pages avant de dormir, ou qu'on emportera en vacances sur la plage. Disons que Tante Gudule ne le lira pas entre un Marc Levy et un Guillaume Musso. Disons que ce n'est pas un livre facile.

Mais c'est définitivement un livre fascinant! Et nul besoin de s'y connaître en peinture pour pouvoir apprécier pleinement chacune de ses pages...



Merci aux éditions Noir sur Blanc et à Babelio pour ce petit bijou!
Lien : http://cequejenlis.canalblog..
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