Dans sa façon de décrire les cultures du futur, Delany est plus souvent proche d'Oscar Wilde. Mais c'est auprès d'Homère qu'il faut chercher son modèle, un Homère aux yeux brûlés par son propre soleil intérieur, dont la voix magnifique et poignante raconte comment les hommes ont pris l'espace, pour s'y perdre à jamais. (extrait de la préface de Tom Clegg et Jean-Claude Dunyach)
Les gens vivaient et mouraient sur ces vaisseaux .
(...) La dernière fois que j'en ai entendu parler, ils en étaient déjà aux B, et je suis bien sûr qu'ils n'ont rien sur Aaaaaaaaaaaaaavdqx.
- Hein... euh, quel était ton dernier mot?
- C'est le nom d'un jeu compliqué d'évaluation des déterminants moraux à travers une vision relativiste de l'instant dynamique.
- Je ne m'y ferai jamais. Depuis six mois que je bourlingue dans les détours de la stase, tous les loups de l'espace que je rencontre ont pour nom Bob, Hank ou Elmer. Mais dès que j'échoue sur une planète perdue ou dans une société simplexe à production unique, tout le monde s'appelle Starman, Cosmic Smith ou Comet Jo.
- Quand on a vécu assez longtemps avec la douleur, poursuivit Dan dont le menton s'affaissa sur la poitrine, ce n'est plus la douleur. C'est quelque chose d'autre.
Sur une des tables se trouvait une pile de livres. Des livres! Les vrais livres étaient le vrai plaisir de Joneny. Mais, lourds et encombrants, ils représentaient un fléau pour la plupart des étudiants. Joneny, lui, les trouvait fascinants. Peu importait leur contenu. A cette époque les livres étaient si vieux que chaque mot semblait y luire comme la facette d'un bijou enfoui. L'idée même d'un livre était si désuète en cette ère hyperrationalisée que le seul bruissement du papier le plongeait dans une délicieuse extase. Tout le monde à l'université considérait sa propre collection, quelque soixante-dix volumes, comme un luxe prétentieux. Le fleuron de cette collection dont chaque page avait été imprégnée de plastique n'était autre que l'annuaire téléphonique de Manhattan pour l'année 1975.