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Critique de absolu


"L'imbrication des histoires les unes dans les autres à l'intérieur du roman permet à Vincent Delecroix d'aborder des registres très différents, du délire philosophique à la complainte élégiaque en passant par la satire des moeurs et par la peinture drolatique de la solitude".
Ils se débrouillent pas mal chez Gallimard, pour donner un avant-goût en peu de lignes. Ne pas trop en dire, le plus juste possible. Pas facile. Moi j'ai toujours eu du mal à faire court.

Toujours est-il que l'auteur parvient à faire d'une chaussure la cause, la conséquence, le moyen, la finalité d'une histoire ou d'une autre. Point de départ ou d'arrivée, vous êtes assurés de la retrouver, dans chaque histoire, toujours sur ce toit. Elle peut tout aussi bien appartenir à un ange en imper, perché sur ce toit, les bras en croix, en pleine nuit, envoyée là par un cambrioleur enragé, abandonné par un amoureux transi venu saluer sa belle accoudée à la fenêtre d'en face.. Tout est possible. Et plausible.

Et puis, l'une des histoires en fait appartient au narrateur d'une autre, et le chevalier anonyme d'une Cendrillon du 21ème siècle se retrouve à caresser un chien en colère contre son maître qui a gâché une relation avec une femme formidable, à cause d'une tragédie grecque, laquelle se joue un peu plus loin dans l'espace ou le temps, sur le toit d'un immeuble. Tout converge vers cette chaussure, ou tout commence. Ce roman est un véritable exercice de style, d'imagination, d'imbrication, d'entrelacements d'histoires sans jamais en perdre le fil. Ariane en serait comblée. Un tissage poétique à ridiculiser Pénélope (vous savez, celle qui fait et défait son tissage chaque nuit).



Ecriture précise "caméléonne", modulant son amplitude, son délié, en fonction des caractères et caractéristiques de chacun, et toujours autour d'un même sentiment, la solitude. L'ange dit : "Mais eux ne faisaient jamais les rencontres que je faisais, qui d'ailleurs étaient toujours plus nombreuses et fréquentes, de sorte que mon accablement était toujours plus profond. Pas un jour sans que j'aperçoive une larme sur un visage, une disgrâce quelconque, un geste méprisable, des vêtements usés, une nuque ployée. Il aurait fallu que je sois un monstre pour ne pas rentrer accablé et avec sur le visage cet air à la fois douloureux et fatigué qui finissait par lasser tout le monde.", quand l'amoureuse exhale son désarroi :"Ma mère ne veut pas savoir que j'ai vieilli deux fois, une première fois quand tu m'as prise dans tes bras, la deuxième fois quand on m'en a arrachée -la première fois je suis devenue une femme, la seconde une morte. Je suis plus vieille que ma mère, plus vieille que n'importe qui.", et que Philoctète agonise sur le toit : "Exactement, mon garçon, ricana Philoctète, ils sont au spectacle, un spectacle qui dure depuis un moment déjà. Inquiet, Ulysse demandé à Philoctète : mais aucun n'a prévenu la police ? Ils sont au spectacle, je te dis, ils ne font rien d'autre. Ils attendent ce qui va se passer. Ils me regardent crever ou gémir. Parfois, je les terrorise, avec mes coups de fusil, parfois ils me prennent en pitié."
D'ailleurs, ce dernier extrait est tiré de la seule histoire narrée à la troisième personne. Monsieur Delecroix, (pardonnez la question), est-ce intentionnel ? Mais surtout, si ça l'est (mes excuses), dans quel but ? Si vous passez dans le coin, je vous en prie, ne vous déchaussez pas. Cela me contrarierait.
Lien : http://www.listesratures.fr/..
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