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Critique de Nicolas9


Simon, un médecin à la retraite, a reçu un drôle d'héritage de la part de son meilleur ami André : un lot de cartons contenant la correspondance, les journaux intimes et les albums photo de ce dernier.
Piqué par une curiosité bien légitime, il entreprend de se plonger dans les souvenirs d'une vie de célibataire et de confident bien remplie. À partir d'une photo prise au début des années 2000 à l'occasion d'une fête de famille, il va tenter de retrouver le fil d'Ariane qui relie les destins de tous ces individus, qu'ils soient vivants ou malheureusement décédés entretemps.
Pour le lecteur, cette quête est l'occasion unique de s'immerger dans le microcosme de la bourgeoisie d'une petite ville universitaire de Suisse romande durant les décennies 1960-2020.
On commence par l'amitié indéfectible de trois jeunes lycéens (on dit « collégiens » à Fribourg), la période des amours, la naissance et la croissance des enfants de l'un d'eux, les premières trahisons au sein du groupe et leur lot de secrets plus ou moins avouables...
Une fresque bien vivante vue à travers le prisme du temps qui passe irrémédiablement et grandit certains alors qu'en parallèle il en abîme d'autres. le récit déroule sa trame au rythme des lettres découvertes au fur et à mesure par Simon, les ères se chevauchent à travers un processus itératif pas désagréable, mais parfois un peu prévisible.
Le rythme est délibérément posé, car il reflète la manière de se projeter de septuagénaires ou d'octogénaires. Je ne critique pas cette manière d'écrire: je l'ai même appréciée par moment. Les protagonistes évoluent dans un univers où la vie est un long ruisseau tranquille (vous comprendrez cette allusion en lisant le livre !) : aucun problème politique, social, écologique ou financier ne vient les bousculer.
Le temps semble avancer sans le moindre accroc mis à part les turpitudes de certains, la maladie ou la mort. En somme, cette chronique aurait pu se passer il y a cent ou deux-cents ans, c'eut été pareil tant les soubresauts planétaires ont peu d'emprise sur ces privilégiés.
On l'aura compris, ce que je regrette ici, c'est la non-insertion de ces notables dans les événements marquants de la deuxième moitié du vingtième siècle : seconde Guerre mondiale, Shoah, guerre du Vietnam, mai 68, l'avènement de la pilule... Non, à Fribourg on se suffit à soi-même et l'on vieillit à l'abri des grands chambardements de l'Histoire, entre soi.
Pourtant, Raymond Delley écrit bien c'est incontestable. Ses descriptions sont fines et impriment en moi des tableaux agréables, ses personnages suscitent de l'émotion et m'ont même arraché quelques larmes, ce qui est bon signe !
Mais, il manque du rythme et un peu d'imprévu dans ce long roman (617 pages). Après une pause au premier tiers du livre, j'ai repris ma lecture. Mais là, arrivé au feuillet 510, il n'est pas sûr que je continue. La faute à de multiples « situations de diversion » brodées autour de la trame centrale dont on aurait aimé connaître plus rapidement l'épilogue...
En conclusion, un opus agréable, empreint de poésie et qui reflète sans doute l'état d'esprit d'une génération et d'une classe sociale qui me sont étrangères malgré ma proximité géographique avec elles. Dommage que le scénario ne soit pas un peu plus nerveux et que les personnages n'habitent pas davantage leur siècle.
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