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Critique de nadejda


Helena Pelletier, après avoir distribué dans différents points de vente ses confitures de fruits sauvages, rentre chez elle dans son pick-up avec à l'arrière l'une de ses filles Sou, quand elle entend à la radio un bulletin d'information : « Un dangereux prisonnier incarcéré à perpétuité pour kidnapping d'enfant, viol et meurtre s'est échappé.»
Aussitôt elle sait, « Jack Holbrook s'est échappé ! le Roi des marais. Mon père. Et c'est moi qui l'ai fait mettre en prison. »
Cette vie qu'elle a réussi à reconstruire avec son mari Stephen et ses deux filles Sou et Iris, ces 15 années qui se sont écoulées depuis son évasion des marais avec sa mère, vont être menacées par ce père qu'elle a aimé et haï. Elle va tout faire pour protéger Stephen qui ne sait rien de son passé et ses deux filles car elle seule peut comprendre et mener à son terme la traque de cet homme dont elle connaît les réactions et la perversité.
p 69 « Ce n'est pas la première fois que je vais traquer mon père, mais je vais faire tout mon possible pour que ce soit la dernière. »

Helena nous fait pénétrer à sa suite dans les méandres de ce marais où elle et sa mère, kidnappée à l'adolescence, ont été retenues quatorze ans.
p 74 … durant toutes les années où mes grands-parents ont cherché désespérément ce qui était arrivé à leur fille, elle se trouvait à seulement trente kilomètres de chez eux. La péninsule supérieure est vaste : vingt-neuf pour cent de la surface du Michigan, trois pour cent de la population , un tiers de forêts.

Mais ce qui m'a retenu, plutôt que la traque, c'est la découverte progressive, au cours des chapitres intitulés « La cabane », de la complexité des relations entre Helena et ses parents et ses réactions vis à vis de chacun d'eux.
Ces chapitres, qui alternent avec les péripéties de la traque, me sont apparus comme un journal, des retours d'Helena vers son enfance qui lui permettent d'y voir plus clair, de comprendre peut-être pour ensuite mieux expliquer à son mari et ses filles sa réaction et sa fuite en avant pour solder enfin ce passé douloureux.
Le conte d'Andersen, « La fille du Roi de la vase », qui sert d'ossature à ce récit contient tous les symboles qui permettent d'éclairer les étapes par lesquelles est passée Helena et je n'oublierai pas cette enfant qui n'ayant pas connu autre chose que cette cabane perdue, protégée des intrusions par les marais environnants, apprend à lire seule dans de vieux National Geographic et un recueil de poèmes de Frost.
Comme Helga la fille du roi de la vase, Helena est double, sauvage et douce, née d'un père aux origines indienne Ojibwé et finlandaise.
Les premières années celles des découvertes elle ressent un amour exclusif pour ce père qui lui inculque les traditions indiennes, lui apprend à survivre, à chasser, à pêcher.
« Le Jacob Holbrook que je connaissais était un homme ingénieux, drôle, patient et gentil. Il prenait soin de moi, me nourrissait, m'habillait.»
Helena veut devenir exactement comme son père : J'imitai ses manières, sa façon de parler, sa démarche. Ce n'était pas de l'adoration, mais c'était pas loin de ça. J'étais totalement, absolument, aveuglément amoureuse de mon père. »
Un père qui la surnommait « Petite ombre ».

Sa mère qui a subi un enlèvement et un viol, soumise par peur des représailles de Jacob est complètement laissée à l'écart. Elle se cantonne aux taches ménagères.
Helena comprendra plus tard que « Quand on est puni plus durement à chaque tentative de rébellion, il faut moins de temps qu'on ne le croit pour faire acte de soumission. »

En grandissant, quand surviendra un contact avec l'extérieur, son désir de s'évader, de découvrir ce qui existe au-delà des marais, et une erreur du père à son égard, permettront à Helena de réagir et de s'enfuir avec sa mère.


La citation de Carl Gustav Jung placée en exergue de ce roman plus complexe qu'il ne paraît traduit le résultat de l'évolution psychologique de Helena :
« Toute progéniture provoque la chute de ses géniteurs. Alors que la génération suivante prend son envol, la précédente entame son déclin. Nos descendants deviennent nos plus dangereux ennemis, ceux justement contre lesquels nous sommes les moins préparés à lutter. Ils nous survivront et arracheront le sceptre de nos mains séniles. »


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