Dossier de l'Art, n°136 : Jacques Stella

L'oeuvre de Jacques Stella est intimement lié à la gravure. L'artiste ne fut pas seulement peintre, il fournit également des dessins d'illustration, gravés par les meilleurs artistes de son temps. Il fut de ceux à qui Richelieu s'adressa pour l'Imprimerie royale nouvellement créée. Il laissa aussi nombre de compositions dessinées très abouties que sa famille se chargea de graver et de commercialiser. Son oeuvre enfin inspira de nombreux graveurs indépendants qui se nourrirent de la clarté et de la sérénité des compositions du maître.

C'est dans le cadre des commandes des années 1644-1652 que Stella renforce sa renommée et diffuse le nouveau classicisme, qu'il a contribué à créer, auprès de la jeune génération.

Artiste érudit, ami et collectionneur de Poussin, Stella est naturellement amené à aborder le répertoire classique, en méditant sur les exemples proposés par le maître, sans pour autant le pasticher. De la même génération que lui, il a compris comme lui la leçon de l'antique, de Raphaël et des Bolonais, à travers l'exemple du Dominiquin.

Stella fut en son siècle un des grands noms de la peinture française, et joua un rôle d'avant-garde dans ce qu'on est convenu d'appeler le classicisme français ou, de manière plus pointue, l'atticisme parisien.

En France, Jacques Stella poursuit la pratique de la peinture sur pierre qui lui permet de se démarquer des autres artistes de la cour et de se faire estimer par des personnalités comme Richelieu dont la collection comporte de nombreux tableaux exécutés sur des supports semi-précieux.

C'est probablement durant son séjour à Florence que Jacques Stella découvre la peinture sur pierre, très réputée dans cette ville où a été crée à la fin du XVIe siècle l'Opificio delle Pietre Dure et où officie le peintre Filippo Napoletano. Stella connaissait certainement la production de cet artiste qui collaborait avec Jacques Callot. Ce n'est cependant qu'à partir de son arrivée à Rome que sa production commence à être documentée. Aux côtés de commandes pour le pape, Stella peint également pour les collectionneurs qui, comme à Paris, apprécient ce type d'oeuvres.

Le succès, Stella l'a connu également par ses tableaux de dévotion au tour charmant, développant notamment les thèmes de la Vierge à l'Enfant, de l'Enfance de Jésus ou encore de la Sainte Famille.

L'inventaire après décès de la nièce et héritière de Jacques Stella permet d'avoir un aperçu des collections qu'avait rassemblées l'artiste. Le maître possédait une cinquantaine de tableaux, dont plusieurs Poussin, ainsi qu'un impressionnant ensemble de dessins, de gravures et une importante bibliothèque.

Pour orner l'église du noviciat des jésuites consacrée en 1642, le surintendant des Bâtiments du roi Sublet de Noyers fait appel à Poussin, Vouet et Stella. Ce dernier livre une oeuvre sur le thème de la Recouvrance au Temple. Moins fréquemment représenté que le Christ parmi les docteurs, l'épisode permet à Stella de manifester une authentique originalité. Il répond également avec cette oeuvre aux exigences de la Compagnie de Jésus en exaltant sa mission : la prédication. Stella peindra par la suite quatre fois cet épisode de la vie de Jésus.

Jacques Stella appartient à la première génération des grands peintres du XVIIe siècle qui allaient tous après leur expérience italienne rompre, de manière plus ou moins radicale, avec le maniérisme de leurs vieux maîtres. L'originalité de Jacques Stella, formé dans le creuset florentin, ses innovations et la qualité de ses apports dans le domaine de la peinture s'éclairent d'autant plus lorsque l'on confronte ses réalisations à celles de ses contemporains.