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Critique de florigny


Dans un décor 100 % suisse où Heidi aurait toute sa place, La promesse raconte l'échange entre l'ancien commandant de la police cantonale de Zurich et un romancier venu donner une conférence sur l'art d'écrire des romans policiers. le premier, pour déglinguer le schéma convenu des polars raconte au second une affaire à laquelle il a été confronté, où l'absurde a balayé la déduction, la logique et la raison des meilleurs limiers.


Dans cette helvétique et donc paisible contrée, depuis des siècles les criminels sont condamnés par les tribunaux et les innocents libérés. Un meurtre, celui d'une fillette dynamite toutes les certitudes institutionnelles, professionnelles, personnelles. Un coupable brillant comme un soleil, trop beau pour être vrai, se pend dans sa cellule et voilà le commissaire Matthias dit Matthias la Cuirasse sapé dans ses convictions les plus intimes. Parce qu'il croit à tort ou à raison en l'innocence du pendu, il se met à la recherche d'un coupable qui n'existe peut-être pas ; parce qu'il a fait à la maman de la petite martyre la promesse sur son âme de retrouver l'assassin, cette enquête devient le combat de sa vie. Il renonce à un poste prestigieux ; est prié par ses supérieurs de lâcher l'affaire ; échoue dans une station-service et s'enferre lentement dans son idée, errant de supposition en spéculation, du simple jeu de l'intellect sans valeur scientifique, « il imagine n'importe quelle foutaise et trouve un moyen de la justifier logiquement » jusqu'à échafauder un stratagème aux risques gigantesques et aux chances de réussite minimes.


La lecture de la promesse – dont il ne faut pas négliger le sous-titre : « Requiem pour le roman policier » - m'a sonnée pour deux raisons ! En premier lieu j'ai apprécié le style concis jusqu'à la perfection de Friedrich Dürenmatt, quelques mots suffisent pour dévoiler un paysage, créer une atmosphère - on distingue l'odeur de l'emmental de celle du gruyère -, croquer un personnage, talents mis au service d'un débat de haut vol entre deux acteurs d'un même événement, celui qui le vit, celui qui le romance. Quelle virtuosité !


Mais ce qui m'a le plus emballée est d'avoir fortuitement découvert dans la présentation de Gallmeister que La promesse de Friedrich Dürenmatt paru en 1958 est à l'origine de The pledge (ce que j'ignorais) réalisé en 2001 par Sean Penn avec Jack Nicholson, un film que j'ai vu et aimé trois fois. Autant dire que ma lecture du roman n'en a été que plus électrique. J'ai retrouvé à l'écran l'ambiance et l'idée de l'oeuvre écrite, Sean Penn ayant avec beaucoup de talent délocalisé ses pompes à essence près d'un lac étazunien. Et qui mieux que Jack Nicholson pouvait interpréter Matthias, policier habité par une obsession, détruit par l'alcool, atteint de folie, qui finit assis sur un banc devant une station service à attendre un criminel. Qui viendra... Ou pas... L'épilogue époustouflant livre la réponse. Une lecture majeure, essentielle.
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