J'avais été très marquée, à l'adolescence, par la lecture de "Moi,
Christiane F., 13 ans...", et l'émotion était intacte à chaque fois que je l'ai relu depuis. Je me suis donc plongée dans cette sorte de suite avec une certaine impatience, mais le récit n'a rien à voir avec celui qui a valu à
Christiane F. une telle notoriété.
Du strict point de vue narratif d'abord, je trouve l'ouvrage moins bien construit et moins cohérent que le premier. Il est d'ailleurs précédé d'une sorte de note prévenant le lecteur que les souvenirs de Christiane sont parfois flous ou désordonnés ; cela se ressent à la lecture. Des bribes de récit s'enchevêtrent sans mener nulle part, des personnages importants apparaissent sans avoir été présentés... Cependant, l'ensemble suit tout de même une progression chronologique assez claire et les derniers chapitres portant sur les années les plus récentes, depuis la naissance de son fils à peu près, sont un peu mieux structurés.
Surtout, la vie de
Christiane F. après la sortie du premier livre (qui lui vaut d'être aujourd'hui encore reconnue dans la rue presque chaque jour, et poursuivie par les journalistes en permanence) ne présente pas le même intérêt documentaire et sociologique que son adolescence de jeune droguée à Berlin.
On suit des tribulations hasardeuses, des Etats-Unis où elle a croisé nombre de stars parce qu'elle y promouvait le film adapté de son autobiographie au début des années 80, à Berlin, Zurich ou les îles grecques où elle continue à cheminer entre amants passagers et grandes amours, périodes de sevrage, de manque, de dépendance ou de substitution, sans livrer sur la société allemande le même regard acéré que dans sa jeunesse.
Elle revient aussi, et c'est peut-être ce qui m'a le plus intéressée, sur les conséquences de la sortie du premier livre :
après la célébrité, les voyages et le milieu de la musique allemande underground, aujourd'hui persuadée d'être surveillée en permanence par de mystérieux agents qui la suivent dans tous ses appartements successifs et volent ou déplacent des objets chez elle, elle est tombée dans une sorte de paranoïa indistincte. Son fils lui a été retiré mais il reste la personne la plus importante de sa vie. Elle vit toujours de ses droits d'auteur et n'exerce pas de profession. Elle souffre d'une hépatite probablement contractée à la fin des années 80 et pense qu'elle mourra jeune, tout en s'étonnant d'avoir déjà dépassé la cinquantaine au regard de tout ce qu'elle a consommé. La drogue fait toujours partie de sa vie, ainsi que les chiens, mais pas sa famille.
L'ensemble est assez triste et à conseiller uniquement aux gens qui tiennent à savoir ce que Christiane est devenue. Si l'on ne connaît pas du tout son histoire, je conseille plutôt la lecture de "Moi,
Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée...".