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Qui parle pour dire la présence ?...
Extrait 3
(Je me souviens)
Les hirondelles et toutes leurs ailes,
en un regard, circonflexes,
m’ouvraient un horizon
qui s’achevait dans l’immobile.
L’été leurs cris obsédants
traçaient la portée d’un chant sans trêve.
Au-dessus l’étrange liberté du ciel,
au-dessous le socle gris de la poussière,
et dans la couture, déchiré
incendié d’attente, mon visage,
l’envol, c’est un pays
pour l’exil.
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Qui parle pour dire la présence ?...
Extrait 1
Qui parle pour dire la présence ?
Dans le ciel et l’ombre du ciel sur la terre
telles les saisons les mères passent,
et les mots. Pour ne pas oublier
peut-être n’avons-nous qu’une voix
du berceau au tombeau.
De la mémoire m’arrivent des fragments,
maison sous le Vercors, lampes et livres,
vieilles femmes, jeune mère, autant de
noms qui peuvent s’accorder à l’enfance
mais le père, le lilas et l’oiseau, les douleurs,
les extases, comment les recouvrer ?
Les silhouettes enfuies avaient alors réalité :
trois enfants, blond brunes, avec leur mère.
Les vivantes avec les morts continuent
leur dialogue et dans le jardin au jet d’eau
leur parole traversée d’accents d’éclairs de reflets
irrigue encore l’ici et le maintenant.
L'arrivée en juillet au large des grandes herbes
et des petits sentiers nous rendait la liberté intacte,
deux mois durant, nos corps poudrés de foin,
de marches et de fous-rires, jambes nues
tachées d'un soleil que le vitrail des arbres
faisait danser sur nos visages et nos mains.
Ma place ici…
Ma place ici et dans le cosmos me restait
incertaine. Qui étais-je ? Où était ma pensée ?
Où mon être entier ?
Les yeux de la mère
coloraient d’un azur inaltéré mon exil qui tintait
haut dans l’étude la marche ou l’amitié
mais leur mélancolie s’effrayait de tout abandon.
Quand la lumière tombe…
Quand la lumière tombe,
dis non aux fausses consolations du vide,
choisis l’empreinte, et consens avec elle
au départ au legs joyeusement insensé
de la vie à d’autres vies.
Quand la lumière tombe,
ta mère même morte, te demande la lune :
"Continue à faire briller pour moi la lampe
de la vie, brillante comme les lucioles de jadis
au cœur des choses vues, et à réinventer. "
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Qui parle pour dire la présence ?...
Extrait 2
(Je me souviens)
Le monde était peuplé : mimiques, gestes, voix
que la mort n’avait pas sanctifiés,
le poème de la vie miroitait
mais pour que le chagrin ne l’assombrît pas
j’essayais d’unir le père et la mère, deux êtres
à la mesure divisée de la terre, de l’amour.