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Citations sur L'art de lire (29)

Il faut s’armer de sagesse même contre les passions les plus innocentes, parce qu’il n’y a pas de passions innocentes, et même en parlant de la lecture il faut dire : Le sage qui la suit, prompt à se modérer, Sait boire dans sa coupe et ne pas s’enivrer.
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Supposez un homme, de nos jours, qui ne lirait que de l’Anatole France, du Loti, du Lemaître, du Bourget, du Régnier… Il me semble qu’il serait exactement dans la situation de cet humaniste dont je parlais plus haut : il n’aurait que le sentiment de l’excellent, avec une certaine étroitesse dédaigneuse d’esprit.

Aurait-il même le sentiment de l’excellent ? En vérité, je ne sais. C’est par comparaison que l’on a le sentiment de l’exquis. Ce n’est pas seulement par comparaison, sans doute, et la beauté nous frappe par elle-même et c’est-à-dire par un accord soudain entre notre façon de sentir et la façon qu’un autre a de créer. Mais il n’en est pas moins que mesurer les distances aide singulièrement à évaluer les hauteurs et, s’il n’est pas mauvais de connaître les prédécesseurs et les contemporains de Corneille pour bien entendre, pour entendre distinctement combien il est nouveau et combien il est grand, à toutes les époques il en est de même, et il faut pousser des reconnaissances dans le pays des médiocres pour revenir aux grands avec une faculté renouvelée d’admiration.

Chateaubriand parle d’un auteur de son temps qui, chaque année, allait faire sa remonte d’idées en Allemagne ; un homme sage doit aller faire de temps en temps chez les mauvais auteurs la remonte de ses facultés d’admiration.
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Lire, c'est penser avec un autre, penser la pensée d'un autre, et penser la pensée, conforme ou contraire à la sienne, qu'il nous suggère.
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On demandait à Massillon, très honnête homme : « Où prenez-vous donc la matière de toutes les peintures de vice que vous faites ? » Il répondit : « en moi-même ». Il est ainsi. Chacun de nous se suffirait presque pour peindre tous les vices et aussi toutes les vertus, s’il savait peindre ; pour reconnaître, du moins, la vérité de toutes les peintures de toutes les vertus et de tous les vices. Chacun de nous est un petit monde où le monde entier se voit en raccourci et est véritablement comme en germe, et le proverbe italien cité par Pascal est très exact : « Le monde entier est fait comme notre famille » et même comme nous.
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Vous me direz qu'il y a des livres qui ne peuvent pas être lus lentement, qui ne supportent pas la lecture lente. Il y en a, en effet ; mais ce sont ceux-là qu'il ne faut pas lire du tout. Premier bienfait de la lecture lente : elle fait le départ, du premier coup, entre le livre à à et le livre qui n'est fait que pour n'être pas lu.
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Etre un lecteur retardataire est dangereux, ... c'est se réserver de lire toujours les auteurs dans un certains refroidissement de la température. "Employez vite ce remède, pendant qu'il guérit", disait un médecin, non pas sceptique, mais qui savait très au juste en quoi consiste la thérapeutique qui est surtout une suggestion. Lisez cet auteur pendant qu'il est bon, dirai-je ; plus tard il deviendra mauvais ; plus tard encore il est possible qu'il redevienne bon ; mais alors vous ne serez plus à pour le lire. n'attendez pas pour faire commerce avec lui le moment intermédiaire où il sera mauvais.
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il y a une catégorie d'auteurs qu'au point de vue de l'art de lire il faut considérer très attentivement : ce sont, comme on les a appelés, "les auteurs difficiles", c'est-à-dire ceux qu'on ne comprend pas du premier regard, ni même du second, les Lycophron, les Maurice Scève, les Mallarmé. Ces auteurs jouissent toujours d'une très grande réputation. Ils ont un ban et un arrière-ban d'admirateurs. Le ban est composé de ceux qui prétendent les entendre, l'arrière-ban de ceux qui n'osent pas dire qu'ils ne les comprennent pas et qui, sans les lire, déclarent qu'ils sont exquis. Ceux du premier ban sont tout à fait fanatique, leur admiration étant faite de l'admiration qu'ils ont pour leur intelligence et du mépris qu'ils font de l'inintelligence d'autrui.
...
Ils veulent que la pensée se garde tout d'abord du lecteur profane par l'obscurité, pour attirer par elle les raffinés, les divinateurs, ceux qui sont intelligents d'une façon exquise. Ils veulent que la pensée fasse le vide autour d'elle pour avoir le plaisir, eux, de franchir la zone déserte, d'entrer dans le sanctuaire, d'y séjourner et surtout d'en sortir en déclarant qu'ils ont compris, mais qu'il s'en faut que tout le monde en puisse autant faire.
...
Ainsi se forme, autour de certains auteurs, des élites qui se savent gré de le pénétrer et lui savent gré d'être impénétrable.
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Le critique ne sait pas lire pour son plaisir et n'apprend pas aux autres à lire pour le leur. Il apprend au lecteur à lire en critique. Or lire en critique n'est pas un plaisir ou du moins est un plaisir très particulier, mêlé de beaucoup de sécheresse. Sarcey me disait... « Comme je suis las de lire les livres pour savoir ce que j'en dirai ! Ce n'est plus lire, cela ; ce n'est plus s'abandonner ; c'est réagir ; c'est lire en soi beaucoup plus que dans l'auteur. » Il avait bien un peu raison. A quoi donc sert le critique ? A faire lire l'auteur à un certain point de vue. Son article est une sorte d'introduction à l'auteur dont il s'agit, introduction, qui, du reste, peut être fort utile. Selon que le lecteur a lu déjà ou n'a pas lu l'auteur, le critique l'invite à lire dans telle disposition générale ou à relire (ou repenser) selon telle orientation nouvelle. Dans le premier cas, il lui dit : « songez à ceci » ; dans le second : « avez-vous songé à ceci ? ». ….. Mais le critique est un homme qui ne sait lire qu'en critique et qui n'apprend à lire qu'en critique, qui n'enseigne que la lecture critique, dont, du reste, je ne songe à dire aucun mal.
Mais voulez-vous lire seulement pour jouir de vos lectures ? Voulez-vous apprendre à lire comme on apprend à jouer du violon, c'est-à-dire pour savoir en jouer et pour prendre le plus grand plaisir possible en jouant ?
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Mais comment lire les auteurs difficiles ? ...
... Il en est qui sont obscurs naturellement, spontanément, très loyalement, sans artifice ; qui sont capables, ce qui est une chose encore que je n'ai jamais comprise, d'exprimer par des mots, de mettre sur le papier, une pensée qui n'est pas devenue nette dans leur esprit ; pour qui la parole ou l'écriture n'est pas un instrument d'analyse ; pour qui la parole ou l'écriture n'est pas une épreuve qui force à se rendre compte de ce qu'on pense ; qui, en un mot, peuvent exprimer ce qu'ils ne conçoivent pas. Ceux-ci, sans doute, il faut les laisser sur le vert, et je ne vois guère quel profit l'on en pourrait tirer ; car de penser, à propos d'eux, ce qu'ils n'ont point pensé et ce qu'ils auraient pu penser s'ils avaient pensé quelque chose, cela est un peu vain et si hasardeux qu'il vaut mieux penser directement pour son compte.
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On lit très peu, disait Voltaire, et, parmi ceux qui veulent s'instruire, la plupart lisent très mal. De même un épigrammatiste inconnu, du moins de moi, disait, au commencement, je crois,du XIXe siècle:
Le sort des hommes est ceci :
Beaucoup d'appelés, peu d'élus ;
Le sort des livres, le voici:
Beaucoup d'épelés, peu de lus.
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