Que la personne malade guérisse ou non, ceux qui vivent cette épreuve avec elle portent aussi des blessures et des cicatrices, et ce n’est pas parce qu’ils n’en parlent pas – à cause du caractère jugé indécent de leurs plaintes – qu’elles n’existent pas ! Cette ignorance des proches ne fait qu’ajouter à leur solitude et à leur enfermement émotionnel.
Hyperprotéger le malade dont vous vous occupez peut s’avérer très toxique pour lui. pour lui. Une trop grande présence où il n’a plus de place pour respirer psychologiquement et une trop grande sollicitude, en rupture avec votre façon habituelle de vous comporter avec lui, risquent de modifier vos rapports. Cela ne fait que souligner pour le malade combien il est différent dorénavant. On peut même aller jusqu’à le priver d’une partie de sa liberté d’action et de décision, sous prétexte que c’est bon pour lui.
Tel est le difficile équilibre à rechercher : ni trop loin du malade, ni trop près ; dans le respect de ce qu’il est et de ce que vous êtes. C’est un réel effort à fournir tout au long de la maladie. Apprendre à s’occuper de soi tout en prenant soin de l’autre, sans excès ni épuisement extrême : voilà l’objectif à se fixer.
Les combats que vous livrez à ses côtés s’inscriront profondément dans votre histoire. Leur violence pourra déteindre sur le cours de votre vie ; et si cette personne venait à mourir, vous sentez bien que, d’une certaine façon, vous continueriez à vivre avec sa maladie.
Le jour de notre naissance porte en lui l'instant de notre mort. Ces extrêmes, fruits du hasard ou de tout autre chose, délimitent un temps que nous appelons notre vie et, entre ces deux points, nous tentons d'écrire notre histoire.
Or, la pensée a besoin de silence pour se construire.
Un matin, cette personne que vous aimez est revenue de chez le médecin : il lui avait donné des résultats d’examens parlant de cellules cancéreuses, de séropositivité, de lésions neurologiques ou de tout autre diagnostic qui, par sa gravité, jetait une ombre menaçante sur son existence. « Je ne voulais pas t’en parler avant. » Elle préférait attendre le résultat des analyses. Mais, alors que s’abattait sur elle la réalité d’une maladie grave, elle venait vous solliciter, car elle avait besoin de vous.
Je voudrais pouvoir vous dire que la souffrance, l’amertume ou la fatigue pourront vous être épargnées grâce à cette lecture, mais ce serait vous mentir et nier la réalité car, aussi préparé qu’on puisse être, il y a des situations contre lesquelles il est impossible de lutter. Ce livre peut seulement vous aider.
Vous pouvez accomplir beaucoup pour votre malade, mais sachez que vous pouvez aller beaucoup plus loin avec lui si vous apprenez à vraiment vous occuper de vous.
Certains disent qu'on meurt comme on a vécu, mais il est clair qu'on meurt comme on meurt et non pas comme on "devrait" mourir, ni comme autrui voudrait qu'on meure !