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Critique de GuillaumeTM


« Watch out the world's behind you » – The Velvet Underground

Ce livre est le témoignage le plus saisissant et le plus réaliste sur l'univers de la drogue qu'il m'ait été donné de lire, mis à part « L'herbe bleue » que j'avais déjà lu il y a fort longtemps mais dont il ne me reste que peu de souvenirs.

« Feeling sick and dirty more dead than alive
I'm waiting for my man » – The Velvet Underground

Il a d'ailleurs reçu, à sa sortie, un certain écho en France ainsi qu'une grande renommée jusqu'à aujourd'hui, même si le titre en français me paraît un peu racoleur et franchement stupide étant donné que l'histoire se déroule sur environs trois ans et que Christiane ne se prostituait pas encore à l'âge de treize ans. le titre d'origine (Nous, les enfants de la station Zoo) était bien meilleur même si moins vendeur d'un point de vue strictement marketing.

« Take me on a trip upon your magic swirlin' ship
My senses have been stripped, my hands can't feel to grip
My toes too numb to step
Wait only for my boot heels to be wanderin' » – Bob Dylan

L'histoire débute lorsque Christiane, ses parents et sa soeur déménagent à Berlin, quittant leur village pour la cité Gropius. Là-bas, elle découvre la pression sociale qu'exerce la société sur les enfants que ça soit à l'école ou à l'extérieur, les rapports de force, l'esprit de compétition et tutti quanti. Son père doit faire face au chômage et donc devient brutal, violent envers sa mère et à ses filles, rentrant souvent tard après avoir passé la soirée à boire au bistrot. Quant aux enfants, dans cette cité peu accueillante, tout leur est interdit, il n'y a pas de place pour l'amusement ou même pour leur simple épanouissement. C'est au centre socio-culturel protestant « La Maison du Milieu » qu'elle y fera sa première expérience du haschich.

« I started out on burgundy
But soon hit the harder stuff » – Bob Dylan

Puis vint l'accès à la fameuse boite de nuit le « Sound », le repaire des toxicos en tous genres. C'est près de ce lieu au goût de prestige à l'aune de ses treize ans qu'elle y fera sa première rencontre avec l'héroïne, d'abord en la sniffant avant de passer à l'injection par intraveineuse. Ensuite ce sera l'escalade vers une dépendance physique, croyant d'abord maîtriser sa consommation, ne sachant pas à cause de son jeune âge que c'est la came qui dicte la règle à suivre, jamais l'inverse. C'est l'époque, 1976, où l'héroïne fait des ravages en Europe, touchant des adolescents de plus en plus jeunes. Les gouvernements semblent désemparés face à ce fléau, cherchant, comme à leur habitude, à éradiquer non les racines du mal, bien trop profondes à atteindre, mais uniquement la partie émergée de l'iceberg.

« Les feuilles tombent des cocas
Et se répandent sur l'occident
Demain tu verras tous ces petits alchimistes
Pulvériser un continent » – Hubert-Félix Thiéfaine

On en retient surtout le sordide dans lequel « l'algèbre du besoin », pour utiliser une formule de William Burroughs, confine les toxicos à un destin tragique, et combien il est difficile de sortir de cette dépendance car, dans le récit de Christiane, on ne compte plus les tentatives de sevrage qui ont finis par une irrémédiable rechute. On voit aussi tous ceux qui profitent de cette situation désespérée tels que les pervers, les pédérastes (ils appellent cela le baby tapin) et même, à mon grand étonnement, l'église de scientologie qui voit là manière à recruter de nouveaux fidèles dans un regain de prosélytisme honteux.

« Seasick Sarah had a golden nose
Hard-nailed boots, wrapped around her toes
When she turned blue, all the angels screamed
They didn't know, they couldn't make the scene » – The Velvet Underground

Il serait intéressant également d'en faire une analyse sociologique afin de comprendre le malaise qui agite ceux, comme Christiane, à se droguer. Peut-être est-ce la société de consommation qui n'offre pas les attentes que recherche la jeune génération, qui n'offre aucun idéal à cette jeunesse perdue entre un quotidien morose et un avenir incertain.

« When i put a spike into my vein
Then i tell you things aren't quite the same
When i'm rushin' on my run
And i feel just like Jesus' son » – The Velvet Underground

C'est un livre, in fine, qui ne se fait jamais moralisateur, décrivant la réalité crue, sans artifices inutiles. Un livre bouleversant où on la suit dans ses déambulations à travers ses déboires et ses peines pour enfin décrocher de la drogue.

« It's too late
To be grateful » – David Bowie
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