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Critique de fuji


Chronique d'une violence annoncée
Alexandre raconte la famille, la sienne et celle du père avant.
Avant, c'est 1975 en Algérie, le père est marié et a quatre enfants. Enfants qu'il va enlever à la mère, pour les emmener en France où ses parents vivent et travaillent ; il est aidé d'un oncle et d'une nièce.
Des jumelles de trois ans, Samir deux ans et un bébé de quelques semaines.
Pour échapper au service militaire algérien, le père a bidonner ses études, mais le système le rattrape , c'est ainsi qu'il fait appel à sa mère et que celle-ci pilote l'enlèvement.
Samir du haut de ses deux ans, accroche sa menotte au pantalon de son père toute la traversée, déjà il attend un signe de celui-ci.
En France, il va devenir associer d'un pressing et occupera avec sa famille un bel appartement à Sarcelles. Il devient très vite la coqueluche de son quartier.
Une vie qui pourrait être heureuse.
Il rencontre une jeune vendeuse en boulangerie qui a un garçon de sept ans.
Ils vont constituer une famille recomposées, et naîtra Alexandre, notre narrateur.
L'atmosphère du livre est lourde, il n'y a pas de répit dans l'escalade de cette violence.
Samir fera d'Alexandre son souffre-douleur, probablement parce que c'est le seul enfant de la fratrie a pouvoir dire papa-maman. Mot qu'il n'aura pas l'occasion d'user, car c'est plutôt l'indifférence qui règne vis-à-vis des enfants. Même lorsque la violence de Samir se voit sur Alexandre, cela n'implique aucune réaction ni inquiétude.
La tendance serait à stigmatiser Alexandre pour son soi-disant manque de courage.
Alexandre va trouver très vite des astuces, des évitements pour échapper à tout cela. Quand il va chez les copains, il ne peut que constater et entériner que sa vie de famille est atypique.
« Ma mère a essuyé mes larmes, nettoyé la blessure, sans un mot doux, admettant par son silence qu'ici, dans la maison, les enfants avaient devoir de souffrance. »
Samir glisse inexorablement sur la mauvaise pente, la délinquance au début et puis la radicalisation.
Le père lui tient toutes les promesses de son caractère, roi pour sa mère, tout lui, est permis, le fils docile est un mari et un père indifférent, joueur, menteur et alcoolique. Donc l'issue est évidente et les lâchetés nombreuses.
L'auteur construit son livre en ponctuant par lieu et date. Ces années sont chacune une déflagration, elle correspond précisément à un évènement marquant.
Mais la subtilité est de ne donner un prénom qu'à celui qui… Samir.
Samir dans cette tourmente ne pouvait que faire naufrage, en attente partout, tout le temps, suspendu à un mot, un geste, une reconnaissance qui ne viendront jamais.
Alexandre Feraga a fait un sacré voyage pour arriver à nous faire partager ce monde de colère qui déferle sans aucun barrage pour l'arrêter.
Ce livre, c'est donner une identité à celui qui a été dans l'incapacité de tracer son chemin d'homme, c'est l'interrogation sans réponse de ce qui fait que l'un peut construire et l'autre pas.
Alexandre a fait un long chemin pour arriver jusqu'à Samir.
Un beau livre, douloureux qui du début à la fin est comme une grenade dégoupillée, le lecteur doit attendre la dernière ligne pour savoir si tout explosera.
Un engrenage dont il est possible de sortir, pourquoi l'un et pas l'autre ? Ce sera toujours une énigme.
Une réflexion faite avec toute la rationalité nécessaire et la sensibilité pour réhabiliter ce petit garçon dont la menotte s'accroche au pantalon paternel : il s'appelait SAMIR .
Merci à Lecteurs.com et la Fondation Orange pour ce privilège de lecture.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/04/24/le-frere-impossible/

Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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