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Critique de michelangelo


Dernier opus de la belle saga intitulée L'amie prodigieuse, ce roman conclut avec brio une histoire d'amitié qui court sur une bonne soixantaine d'années. Entre imaginaire et autobiographie, Elena Ferrante va décrire la relation toujours tumultueuse de Lina et Elena.
L'évènement marquant du roman est la disparition de Tina, fille de Lina et d'Enzo, qui va plonger sa mère dans une dépression dont elle ne sortira pas ou que par intermittence.
Quant à Elena, écrivaine reconnue et célèbre, son retour dans le Naples de son enfance, à la suite de la séparation avec son mari, va être émaillé de nombreuses désillusions. Son amour d'enfance, le beau Nino, la délaisse après l'avoir mise enceinte. Elena, militante féministe, va vivre une situation qu'elle exècre : celle d'une femme victime de la domination des hommes. Elle trouvera dans sa réussite professionnelle les raisons de croire en un avenir pourtant bien sombre.
L'amitié et le respect réciproque qu'entretiennent Lina et Elena l'une pour l'autre vont-ils résister au temps qui file, aux difficultés d'être parents, à cette soif de reconnaissance, à cet environnement humain complexe dans une ville multiforme comme Naples ? A vous de le découvrir !
Le roman est émaillé d'éléments historiques et politiques bien décrits dans une Italie en plein chambardement. Malgré tout, cela n'est qu'une toile de fond. Les personnages secondaires s'effacent peu à peu pour laisser place à une prodigieuse confrontation entre Elena et Lina qui peinent à s'entendre, à s'écouter. Les épisodes tragiques se succèdent. Les morts se multiplient…
Chacune est embarquée dans une aventure où les points de rupture s'amoncèlent. D'abord les amours, subis ou désirés, puis la difficulté d'être mère dans un univers où les pères sont trop absents, puis la vieillesse inexorable qui oblige à rendre des comptes et tirer des bilans pas forcément flatteurs…
Alors que Lina décide peu à peu de s'effacer, au propre comme au figuré, dans une ville de Naples complètement sacralisée et en pleine transformation, Elena se battra jusqu'au bout, pour son amie et pour elle-même, alors même qu'elle prend conscience de la vacuité de l'existence humaine.
Plus psychologique que les trois précédents romans, ce dernier possède une force indéniable. Il interroge et bouscule. La fiction rejoint souvent la réalité au point que l'on essaye vainement de faire la part des choses entre ce qui a été vécu et ce qui reste imaginaire.
Le lecteur ne peut éviter de mettre sa propre existence en parallèle, de la mesurer à l'aune de ces personnages attachants et tellement réels. Ce temps révolu, ces napolitains disparus, revivent devant nous, consistants et volubiles, lâches ou braves, amoureux ou jaloux, appliqués ou incapables, érudits ou analphabètes, commerçants ou caméristes, intellectuels ou manuels… à l'image de l'humanité dans ses grandeurs et ses décadences.
Elena Ferrante nous livre une belle leçon de vie. Pour ne rien gâcher, l'écriture est soignée, certaines phrases font mouche et incite à la réflexion. C'est certainement ce qui rend son ouvrage si particulier et tellement addictif.
En définitive, qui est l'amie prodigieuse ? Pour Lina, c'est Elena. Pour Elena, c'est Lina. Chacune a trop aimé et trop étreint l'autre. Cette ambivalence de sentiments où l'amitié agit comme un poison autant que comme un remède nourrit une relation forte qu'on rêve de vivre à son tour. Mais la pâleur des relations que le commun des mortels, dont je suis, est condamné à vivre nous interdira de connaitre une amitié aussi rare mais belle et destructrice.

Michelangelo 28/01/2019



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