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Critique de chocobogirl


François Lizeaux est un jeune interprète de chinois . Nouvellement promu à Shanghai, il travaille désormais pour le consulat de France. Il s'agit de son premier poste mais aussi de son premier voyage en Chine. Il a 25 ans et très excité, il envisage son séjour sous d'heureux hospices et espère bien profiter de la célèbre vie shanghaïenne avec ses fêtes et ses filles faciles. Sauf que la vie d'expatrié n'est pas toujours facile. Exploité par le consulat, il va en plus être approché par les services secrets chinois. Son amour pour la belle An-Lili le sauvera-t'il ? rien n'est moins sûr...

Dans une première partie, le lecteur va découvrir de l'intérieur le monde consulaire dans toute sa splendeur en accompagnant le narrateur dans sa découverte du métier d'interprète et dans celle de la Chine. François, petit maillon transparent dans la chaîne, va se retrouver submergé de boulot. Travaillant 7 jours sur 7, à toute heure, sa vie privée se réduit à une portion congrue. Indispensable au bon fonctionnement des réunions, colloques, rencontres entre dignitaires et même soirées privées, François reste malgré tout un pion transparent dont on ignore avec habileté les faibles récriminations. le jeune homme, persuadé qu'il deviendra ainsi plus chinois que français, fait tout ce qu'on lui demande sans rechigner.
Possédant la maitrise de la langue chinoise que ses compagnons ne possèdent pas, François va très vite découvrir les jeux d'influence, les mesquineries, les petites arnaques financières qui ont cours au consulat. C'est le règne du chacun pour soi et notre interprète l'apprend à ses dépends. Souvent escroqué par méconnaissance du système chinois et du fonctionnement du consulat, il va découvrir que tout le monde pratique mais que personne ne dit rien, ni ne partage ses "bons plans" avec les autres. le consulat lui même magouille pour facturer plus cher des prestations afin de mieux empêcher la différence de tarif et n'hésite pas non plus à en faire autant avec ses employés.

Amoureux de la culture chinoise, François va découvrir néanmoins la société chinoise à travers ses rencontres consulaires et ses relations épisodiques avec les femmes. La Chine promeut le culte de l'apparence et met la valeur de l'argent au dessus de tout. Les étudiantes chinoises, qui espèrent se marier et obtenir un passeport étranger, cèdent facilement aux avances et n'hésitent pas parfois à faire payer leur faveurs pour améliorer l'ordinaire. Chaque transaction nécessite des dessous de table et refuser le système signifie l'arrêt de toutes négociations. La raison d'être de tout chinois est de s'enrichir le plus vite possible et cela peu importe les moyens.
Les visiteurs et les hommes d'affaires étrangers ne sont pas épargnés. Comme les consulaires, ils n'hésitent pas à profiter du système et les voyages professionnels se transforment très rapidemment en voyage autour de la luxure. Les hommes trompent leurs femmes à tout va sans aucun scrupule. Leur bêtise et leur vision, bourré de clichés, de la Chine les avilissent un peu plus.

La deuxième partie du roman, tout en reprenant les éléments cités ci-dessus, se concentre un peu plus sur le couple François / An Lili. Prêt à devenir chinois de coeur et d'esprit, François se renomme Li Fanshe et fait la connaissance d'une shangaïenne pure jus, rédactrice dans un magazine de mode, dont il tombe follement amoureux. Lui ouvrant les yeux sur le règne des apparences, cette dernière va le pousser à se comporter comme un chinois local et à voir égoistement où est son intérêt. François va désormais se rebeller quelque peu envers le consulat, poser de faux arrêts maladies pour mieux effectuer de l'interprétariat au noir bien mieux payé, réclamer de l'argent dû, etc. Car, là est bien le but : s'enrichir le plus possible et le plus rapidemment. Gourmand, le couple en veut toujours plus et An Lili réussit à balayer les quelques scrupules de son compagnon. Hélas, l'argent ne fait pas le (double) bonheur....

Bref, vous l'aurez compris, le tableau de la Chine et des services consulaires que nous pouvons lire ici est loin d'être glorieux et même plutôt pathétique. Etat communiste, la Chine se révèle affamé de capitalisme et d'argent à tout prix.

"finalement le communisme réussit plutôt bien à la Chine"

Le monde de la diplomatie est fait tout autant de faux semblants, ses acteurs sont puants et avides de sexe et de papier monnaie. Et les étrangers des crétins finis qui gobent le jeu des clichés joués par les chinois.
Alors si j'ai aimé ma lecture, je n'ai pas aimé ce que j'ai lu....
L'auteur vivant en Chine depuis 20 ans et parlant couramment le mandarin comme son personnage, on ne doute pas de la véracité et du réalisme de cette histoire. Et c'en est d'autant plus atterrant. Je dois dire que si l'idée que je me faisais de la Chine ne me poussait déjà pas à apprécier particulièrement ce pays, ce roman enfonce d'autant plus le clou ! Difficile de trouver ce pays attirant quand on découvre que les valeurs principales sont l'intêret et le profit personnel.
Le roman est très intéressant pour cette plongée dans un monde qui ne nous est pas tellement famillier : le fonctionnement d'une ambassade mais aussi ce pays un tant soit peu "exotique" qu'est la Chine.
Je regrette pourtant que le portrait de Shanghaï qui est donné n'aille pas au delà de ce cercle restreint du monde des expatriés. J'aurais aimé pénétrer plus profondément dans le quotidien du peuple shanghaïen, dans ses petites habitudes, ses métiers,... Dans "Double bonheur", nous ne trouvons que peu de petites gens. Gravitant dans les sphères de pouvoir, le milieu des affaires et des arts, François ne côtoie qu'une certaine fange de la population et le portrait s'en trouve quelque peu tronqué.
De plus, le personnage de François m'a semblé assez détestable. Naïf et malléable, son amour pour An Lili et son envie de pénétrer et comprendre la vie chinoise le pousse à accepter toutes les compromissions. Voir ce jeune homme frais et enthousiaste, se transformer en arriviste qui courre après l'argent m'a déçue.

L'écriture, de son côté, est assez surprenante. le ton est souvent humoristique et décalé. L'auteur a fait le choix de traduire de façon purement littérale certaines expressions ou noms, petits clins d'oeil au métier du narrateur. Comme par exemple, les coktails qui deviennent des "queues de poules" !
On y trouvera également de nombreuses expressions ou proverbes chinois, savamment édicté par An Lili.
Les dialogues, quant à eux, ne pourront nque vous surprendre. Insérés directement dans la narration, ils pourront perturber dans un premier temps votre lecture.

" Bofu ne comprenait pas pourquoi je n'étais pas diplômé de Harvard, papa il est français pas américain et j'avais lu la perplexité sur son visage la France n'était donc pas un Etat de l'Amérique, plus maintenant Bofu mais ça reviendra bientôt très bientôt nous l'espérons tous. "

Etonnant bilan au final que celui-ci ! Loin d'être mitigé, il est même positif ! le roman est passionnant même si certaines longueurs aurait pu être évitées. On y apprend pas mal de choses sur la société chinoise, ses valeurs, son fonctionnement.
Mais que le portrait que l'on découvre est haïssable.... Si on y trouve effectivement beaucoup d'ironie et que le personnage principal n'hésite pas à se moquer de lui-même, je suis loin d'avoir trouvé le récit "jubilatoire".
Lien : http://legrenierdechoco.over..
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