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Critique de Pasoa


C'est toujours avec un sentiment très particulier que je reviens vers les Fables de Jean de la Fontaine. Elles sont inséparables du souvenir de mes premières lectures, du par-coeur qu'écolier on nous imposait pour ensuite les réciter devant la classe, des illustrations qui les accompagnaient… Jamais l'imaginaire de l'enfance ne fut autant sollicité que par ces fables, que par tous ces animaux et cette nature doués de parole et d'action, que par cet univers si particulier.
Si les souvenirs de l'enfance font leur chemin, c'est encore avec une vraie curiosité que je les relis aujourd'hui.

La Fontaine est-il un moraliste ou un poète ? Davantage un poète selon moi. Dans ce qu'il considérait lui-même comme un divertissement, un badinage, un « enjouement », il fait dans ses Fables un usage de la rime et d'un style qui sont proprement poétiques.

Aussi attachantes soient-elles, étrangement, les Fables portent chacune en elles un moment de tension, un jeu de pouvoir, un rapport de force. Deux ou plusieurs protagonistes se rencontrent qui font entendre un désaccord, une rivalité que leur nature, leur position leur imposent. de cet antagonisme, La Fontaine en tire une leçon de morale particulière où triomphent bien plus souvent la force et la ruse, que le bon droit.

La Fontaine est un moraliste sans tout à fait l'être. S'il se sert des fables pour imposer la question morale sur de nombreux thèmes qui touchent aux caractères humains (la vanité, la duperie, la colère, la naïveté, l'imprévoyance, la flagornerie, etc.), il ne répond que sur leurs conséquences, sans jamais les blâmer tout à fait. Ce qu'il faut penser du loup qui menace l'agneau, du renard qui dupe le bouc ou encore de la fourmi impitoyable face à la cigale, etc. La Fontaine n'en dit rien. Il laisse au lecteur la possibilité d'en décider : « En toute chose, il faut considérer la fin. »

« LE RENARD ET LE BUSTE

Grands, pour la plupart, sont masques de théâtre ;
Leur apparence impose au vulgaire idolâtre
L'Ane n'en sait juger que par ce qu'il en voit.
Le Renard au contraire à fond les examine,
Les tourne de tout sens ; et quand il s'aperçoit
Que leur fait n'est que bonne mine,
Il leur applique un mot qu'un Buste de Héros
Lui fit dire fort à propos.
C'était un Buste creux, et plus grand que nature.
Le Renard, en louant l'effort de la sculpture :
Belle tête, dit-il; mais de cervelle point.
Combien de grands Seigneurs sont Bustes en ce point ? »

Un singe et un dauphin, un lion et un âne, un lièvre et une tortue, un loup et une cigogne, un rat et une huître,… Autant de rencontres improbables qui nous rendent les animaux des Fables, tous doués de parole, vraiment fascinants. Si La Fontaine met en scène d'autres personnages, tantôt tirés de la mythologie romaine, tantôt du monde paysan ou de la Cour, chacun d'eux nous parait comme familier. le récit, la fable poétique nous tient cependant comme à distance d'eux, pour que nous puissions mieux les considérer chacun. Une manière pour l'auteur de magnifier tous ses personnages, de les rendre inoubliables, mais aussi de surprendre et d'édifier le lecteur-spectateur. C'est un précieux héritage que nous a laissé Jean de la Fontaine.

« Bornons ici cette carrière.
Les longs Ouvrages me font peur.
Loin d'épuiser une matière,
On n'en doit prendre que la fleur.
Il s'en va temps que je reprenne
Un peu de forces e d'haleine
Pour fournir à d'autres projets.
Amour, ce tyran de ma vie,
Veut que je change de sujets :
Il faut contenter son envie.
(…) »

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