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Critique de aa67


aa67
16 décembre 2023
Une enquête menée au rythme d'une poésie.

Ou, comment a-t-on pu infliger cela à des mères et aux familles qu'elles devront bâtir après ça ?
Eric Fottorino a choisi de nous en parler sous la forme d'un long poème mis en prose. Bien lui en a pris car en refermant le livre, je me suis dit que c'était la seule forme pour donner créer douceur qui m'a tant émue.
En choisissant ce livre, je ne l'avais pas ouvert ; j'en avais juste lu le résumé et avait envie de lire cet auteur que j'avais un peu abandonné. En l'ouvrant j'ai lâché un « Oh! » de surprise. Puis très vite, dès les premières lignes de ce livre poésie, j'ai été comme saisie par une ambiance enveloppante à laquelle on ne s'attend pas forcément.
Il dit son besoin viscéral de retrouver cette petite soeur à la fois présente toutes les heures de tous les jours de la vie familiale et pourtant restée inconnue durant tant d'années. Ce qu'il réussi à faire de ce très long poème est émouvant et très beau.

Le 10 janvier 1963, trois ans après la naissance de l'auteur, sa mère, vingt ans d'âge, accouche d'un deuxième enfant, une petite fille. Cette fois la grand-mère lui impose de l'abandonner dans l'institution religieuse, place des martyrs s de la résistance à Bordeaux ; abandon qu'elle voulait d'ailleurs déjà imposer à la naissance d'Eric Fottorino. Tout cela va pourrir la vie psychique de cette toute jeune maman avant de pourrir celle de la famille qu'elle tentera de forger.
Le choix de métier de cette mère, infirmière de nuit, lui permettra de se retirer de la vie sociale autant que faire se peut. Se coucher dès qu'elle a finit de soigner les autres et voir le moins possible ce monde qui lui a pris la chair de sa chair, son enfant. Ses enfants pareillement, vont en subir les conséquences et devoir vivre dans cette ambiance mi-figue, mi raisin, à savoir de merveilleuses phrases d'une maman dont le regard est ailleurs lorsqu'elle les leur dit.
Tout le livre est imprégné de la souffrance de cette femme et on comprend, qu'un jour, Eric Fottorino ait décidé de trouver, vaille que vaille, cette petite soeur dont il ne connait ni nom ni prénom.
Un jour il veut pouvoir lui dire « Tu ne la connais pas, elle ne te connait pas, c'est ta mère . »

Après ce livre j'ai compris l'origine du regard d'Eric Fottorino, la source de cette sensibilité qui nous saute à la figure, de ce calme acquis au fil d'un long chemin vers la lumière.

Citations : ou disons plutôt quelques petits bouts de poèmes en prose sortis de leur contexte mais qui révèlent leur musicalité
…« là où tu es
puisses-tu être quelque part
imagine à présent ses yeux rieurs
son mépris des convenance
sa fantaisie
ses facéties
la porcelaine de son sourire
son immense envie d'aimer
et d'être aimée
affreusement seule pourtant
avec ce sentiment odieux
d'être sale
parler lui est douloureux
prendre la parole c'est prendre
(et prendre elle ne sait pas)… 

…on s'est installé loin de Bordeaux
de ses noirceurs
de ses cancans de ses curés
des mauvais souvenirs
des mauvaises rencontres
loin de tout ce qui avant était nous
quand nous n'étions rien…

…on se retrouvera bientôt à Bordeaux
là où tout a commencé
tu seras là avec maman et moi
nous trois
nous voir vite
même si nous appréhendons ce moment
toi surtout
tu crains le poison de l'abandon
la sensation d'être en trop
la honte tenace de ce que tu es à tes yeux
pas assez reluisante
pas assez bien habillée
pas assez bien tout court…

…tu t'avances vers moi
je m'approche de toi
nous atteignons
l'autre versant de la nuit
je découvre l'aube de ton sourire
la flamme dans tes yeux ambrés
dont la couleur m'importe peu
tu es plus grande que moi… »
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