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Critique de Luniver


40 000 heures, c'est le temps de travail d'une vie d'un travailleur moyen, à savoir 30 heures/semaine pendant 35 ans. C'était en tout cas ce qui était estimé en 1965, pour un avenir « proche » : avec les progrès fulgurants dans le domaine technologique, comment pourrait-il en être autrement ? On fait la même chose qu'avant avec moins de main-d'oeuvre, moins de temps et moins d'argent.

Lire une ancienne prospective qui parle de notre époque actuelle est toujours intéressant, et provoque souvent l'amusement. L'auteur aura-t-il identifié à l'avance les grands problèmes de notre siècle, ou se sera-t-il au contraire perdu dans des fantasmes qui se seront dégonflés à peine quelques années plus tard ?

Niveau fantasme, on en retrouve en effet quelques uns, et c'était sans doute inévitable. On ne pourra s'empêcher de sourire devant l'enthousiasme de l'auteur pour le « pétrole comestible » qui réglera bientôt les soucis de famine. On rira un peu plus jaune quand il encense les pesticides et les engrais chimiques qui permettront à chacun de recevoir une alimentation équilibrée et d'atteindre un âge vénérable sans plus subir les effets des carences alimentaires.

Mais dans l'ensemble, les questions qu'il pose n'ont rien perdu de leur intérêt aujourd'hui. Même sa thèse des 30h/semaine d'ailleurs, si elle semble farfelue à l'heure du « travaillez plus pour espérer gagner autant », a été proche de se réaliser : la France a adopté les 35 heures, et la Suède a bien adopté les 30 heures. Si la crise de 2008 n'était pas passée par là, la diminution du temps de travail aurait pu encore progresser.

L'auteur pointe plusieurs questions épineuses pour les années à venir, qui n'ont toujours pas trouvé de réponses concrètes aujourd'hui. Tout d'abord, l'abandon des secteurs d'activité primaire et secondaire vers le tertiaire, qui implique que la moindre tâche implique désormais un minimum d'étude et de formation pour être réalisée correctement. La possibilité de trouver un travail qui ne nécessite aucune qualification s'amenuise d'années en années. Et d'un autre côté, la formation de ce nouveau type d'employé pose problème : il faut apprendre plus de choses à plus de gens, ce qui implique de recruter un nombre tout aussi important de (bons !) professeurs et de formateurs, qui ont, eux aussi, un besoin d'enseignement et de formation de qualité. le risque est grand que l'école finisse par s'effondrer sous le poids de ses nouvelles responsabilités.

Le temps de loisir a également considérablement augmenté : la majeure partie de la population dispose désormais de temps libre, après la journée de travail, et quelques semaines par an. Pour l'auteur, l'être humain n'est pas encore préparé à ce genre de chose, qui n'arrivait jusque là qu'à certains classes privilégiées, le reste de l'humanité passant l'essentiel de son temps à travailler pour préparer sa survie. La qualité des divertissements d'ailleurs est au ras des pâquerettes. Il pointe également la jeunesse, qui traîne dans la rue, complètement désoeuvrée.

Dernier point majeur, la hausse de l'espérance de vie. Là aussi, tout reste à inventer. Un pan entier de la population qui dépasse l'âge de travailler, tout en restant relativement actif et autonome, est une situation toute nouvelle pour l'humanité.

L'essai me semble donc toujours aussi pertinent aujourd'hui. À part quelques détails, les questions me paraissent toujours d'actualité. Est-ce parce que l'auteur a bien cerné les problèmes de notre époque, ou se contente-t-il de reprocher les mêmes maux que chaque génération pense avoir inventé ? Il est encore un peu tôt pour moi pour le dire, mais je vais tout de même retenir quelques arguments du livre au risque, peut-être, de déjà passer pour un vieux con.
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