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Critique de Fleitour


Un grand roman que l'on classerait volontiers parmi ceux de la collection fleuve noir, si celle-ci circulait encore. Une saga qui pointe son nez en Californie à Oakland, et pour être sombre en devient noire, désespérant de l'Homo Sapiens.
Un débordement de 750 pages ne s'écoule pas aussi aisément que des coupures entre les mains d'un faussaire ou d'un milliardaire qui n'a pas su qu'il aurait pu devenir un bon papa.
Ce fleuve ne coule pas, il tourbillonne, manque t-il de pente, non, car il connaîtra une chute de plus de 100 m, il est parfois à l'étal, comme prisonnier de la Stasi en souffrance de son destin, ou bientôt, dévastateur.


C'est bien le charme de ces voyages littéraires improbables, qui ne respectent aucune escale, aucun confinement, aucune accalmie comme si la Bolivie commençait sur les pentes mexicaines. "Purity" du nom d'une jeune Californienne, "Purity" qui signifie pureté, est le titre du roman de Jonathan Franzen.
Notre rencontre avec sa mère Mme Tyler, lance l'intrigue sur des bases solides, pas de mari, pas de nom. Purity Tyler se fait appeler Pip Tyler et loge dans un squat au milieu d'allemands pacifistes.
Avec ce jolie diminutif Pip, Purity se fait draguer par une jeune et jolie femme, et fini entre les bras d'Annagret pour un interrogatoire bien étrange.


Direction la Bolivie où l'attend le principal personnage de ce thriller endiablé, Andreas Wolf, élevé au milieu des écoutes de la Stasi. Fils d'un dignitaire de l'Est il est devenu un hacker à la tête d'une ONG, Sunlight Project.

Annagret âgée de 16 ans, n'avait-elle pas des liens avec l'Allemagne de l'EST ?
Les confidences d'Andréas nous ouvrent l'arrière boutique de ce monde de l'ombre.
"Son père avait pour mission de manipuler les chiffres avec parcimonie, de démontrer des augmentation de productivité là où il n'y en avait pas, comme d'équilibrer un budget qui s'éloignait un peu plus de la réalité, de gonfler les quelques succès de l'économie et de trouver des excuses optimistes à ses nombreux échecs".
Et la Mère d'Andréas, Katya. joue, simule, invente... d'une beauté diabolique elle a servi le parti. 40 années à amadouer, les plus stupides, les plus cruels, les plus couards des béotiens de la RDA , "envolées soupire t-elle" ; Andréas soupira, page 211, "ça ne m'intéresse plus de savoir qui était mon père".


La prodigieuse accélération du récit, commence, entre le passé tumultueux d'Andréas et le passé inexistant de Pip, un vent de vérités soudain balaye les pages, soufflant avec ses oublis fâcheux. La mise en scène faite de révélations diverses, aussi vraies que fausses, mêlées à celles des lanceurs d'alertes, tinta le monde de Pip d'un courant de folie.


Même une chatte ne retrouvait plus ses chatons. Ce sont les aventures amoureuses de Fip qui vont mettre un brin de pagaille dans les intrigues. Là où la virtuosité de Franzen est la plus visible, c'est d'avoir monté chaque épisode comme une table gigogne. Tout est empilé de façon méthodique un homme une femme, puis un homme une femme. La sixième table coince, et brusquement aucune ne peut s'extraire seule.


Le piège se referme sur chaque acteur, aucun n'a la totale maîtrise de son destin, le lecteur perd le nord, bien contraint comme moi de revenir en arrière pour suivre un certain Tom à la trace.
--Tom, je suis en train de te dire que je sais tout. Lui lance Pip page736.
--Ouh là . Bon.
--Tom je n'ai pas lu ton document.
--Ah bien . Excellent Pip.


Un volume entier pour tenter de mettre des mots sur ce qui fait l'identité de chaque être humain. Devenir un lanceur d'alertes ne donne pas la solution de ce questionnement.
"Un exhibitionniste radical est une personne qui a renoncé à son identité. Mais l'identité au milieu du vide est tout aussi dénué de sens."
"Pour avoir une identité, tu dois croire que d'autres identités existent également. Tu as besoin de proximité avec d'autres gens. Et comment construit-on la proximité ? En partageant des secrets."

Identité, secret, vérité, partage, exister, s'affirmer ? le roman n'a pas épuisé nos questionnements, il les a mis en lumière, ne sommes nous pas tous "à la recherche du temps perdu."
Un bon roman comme un bon vin, que l'on a du plaisir à déguster, vif, alerte, de belle couleur, enivrant, aux belles robes que l'on admirées, sur les épaules de Fip, Leila, Katya, Anabel, Annagret...
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